Le journal de Suzanne Madeleine MORISOT

 

Le texte ci-après a été compilé à partir d’un manuscrit conservé à la bibliothèque de la Société du Protestantisme Français. Il s’agit d’un journal tenu par une jeune femme originaire de Metz, Susanne Madelaine MORISOT, réfugiée à Hanau près de Francfort sur le Main en 1749. Ce journal rapporte des événements qu’a vécus la narratrice mais également des événements qui ont concerné sa famille dont sa mère et ses arrière-arrière grands parents.

Dans cette première partie sont évoqués la Révocation de l’Edit de Nantes, les dragonnades survenues à Metz à partir du 29 août 1686 et le traitement infligé au cadavre de Susanne LE GENTILHOMME.

Le récit est celui de Susanne BAUDESSON, née en 1677, fille de Susanne LE GENTILHOMME et arrière grand mère de Susanne Madelaine MORISOT.

J’étais âgée de 7 ans lorsque l’édit fut révoqué : on ferma nos églises. Mon père était diacre et mon grand père ancien ; ils avaient une grande fabrique de peluche unie et façonnée pour chaises, ils fabriquaient aussi des draps pour habits d’hommes et pour rideaux, ils avaient 200 ouvriers qui travaillaient sur métier, tant ceux qui travaillaient dans sa maison où était sa fabrique que ceux qui étaient mariés et qui travaillaient sur leur propre métier dans leur maison sans les fileurs et fileuses. On envoyait chez chaque réformé avec une patente du roi qui était une abjuration de la religion réformée où l’on prétendait que chaque réformé le signât d’abord sans réplique et se rangeait à l’instant à la religion catholique romaine sans qu’on exigeât qu’on fut instruit dans celle-ci, ce que chaque réformé refusa.

(Metz appartenait autrefois à l’Empire et était une ville impériale. Les magistrats étaient des 2 religions. Après la prise par la France, on leur laissa leurs droits, maisons mais on ne leur laissa à Metz qu’une église et une à la ladrerie proche de la ville mais on continua à prendre des réformés en charges publiques).

 

Les nobles mêmes ne furent pas exempts des mêmes menaces disant à chacun que si demain il ne signait pas il aurait l’exécution. On revint le lendemain et à tous ceux qui refusaient de signer on leur laissa un dragon en exécution de sorte que cette triste époque est nommée la dragonnade. On donna démission à ceux qui étaient en charge. Personne ne se montrait en public dans la crainte qu’on avait d’un bruit que, si on n’obéissait pas aux ordres du roi, dans une nuit on massacrerait tous les huguenots.

 

Mon grand-père refusa comme tous les autres. On lui laissa un dragon ensuite 2 et puis 3 et on continuait pendant 12 jours où on leur laissa par jour un dragon jusqu’à ce qu’ils en eurent 12 à discrétion sans une pièce d’argent qu’on était obligé de leur mettre sous leur assiette. Ils avaient tant bu le jour qu’ils étaient multipliés jusqu’à 12, qu’ils prétendirent que ma grand mère leur donnât des ortolans rôtis à manger. Elle leur représenta qu’il n’y en avait point à Metz mais seulement à la table des rois. « Mais je vous promets demain un bon diner et la cave ouverte ».

Les soldats : « Nous en contenterons et si vous nous faites même promener avec des flambeaux par la ville ». Ce qui fut fait. Le lendemain, la grand mère alla à la cour de sa maison, ses appartements étant occupés par les dragons. Elle s’assit sur la première marche et s’endormit de lassitude. Les 12 dragons vinrent danser.

L’un lui dit « viens danser avec nous, vieille huguenote, tu nous as fait un si bon diner et le vin était si bon qu’il nous fait tous danser ». Il la prit si fort qu’il lui enfonça 2 côtes. Elle fit un cri et tomba. Le grand père accourut, la transporta sur un lit où elle souffrait extraordinairement, fit venir le médecin et un chirurgien. Elle avait 2 côtes cassées. Le grand père porta plainte, la justice vint et questionna le médecin qui déclara : «  Elle est âgée et d’une complexion délicate, elle n’en reviendra pas ». Le lendemain, on vint de la part du Parlement lever l’exécution mais on interdit au grand père de rester auprès de sa femme. On lui donne derrière la maison quelque appartement avec ses 6 enfants dont l’aîné était marié (1). On mit un soldat à la porte de l’appartement de la grand mère pour éviter que les siens ne viennent. On lui donna une femme catholique pour la servir et le prêtre venait plusieurs fois par jour pour la persécuter. Quelqu’un du Parlement venait aussi tous les jours lui faire la lecture de l’ordre du roi. Elle refusa à chaque fois de signer. Elle demanda de pouvoir embrasser les siens car elle sentait sa fin proche. Le lendemain, l’exempt revint lui lire l’ordre pour la faire signer mais elle refusa, voulut revoir sa famille.

 L’exempt dit « Si vous mourez dans la RPR, on mettra vos enfants et votre mari à la porte, le scellé sera mis sur tous vos biens puis mis en vente ensuite votre bien sera partagé depuis les cendres du feu jusqu’à vos joyaux et la moitié sera confisqué au profit du roi. Votre corps sera mis au cachot jusqu’à ce que le bourreau vienne pour le trainer par la ville, on vous refusera la sépulture et votre corps sera jeté à la voirie où il sera mangé par les corbeaux ».

La grand mère dit « Ah, quelle sentence pire qu’à un malfaiteur ».

Le prêtre qui était toujours là à la lecture lui dit « Madame Bodson au nom de Dieu ayez pitié de vous-même et de votre famille, changez vite de religion, donnez gloire à Dieu, aux saints, à la Ste Vierge et donnez moi la main ».

La grand mère répondit « Je donnerai gloire à Dieu en lui restant fidèle et gardant la foi que j’ai en lui et en Jésus Christ mais je ne changerai pas de religion ».

Le prêtre dit « Considérez l’affront fait à votre corps ».

La grand mère répondit : « N’importe, il ne s’en sentira pas ». Elle demanda à sa famille de venir car sentait sa fin proche. Ils arrivèrent avec défense de parler de la religion ou de la bible.

 

La grand mère dit « Je vais vous quitter pour ce monde, les derniers moments sont chers, je m’en vais à mon Dieu, j’ai eu beaucoup à combattre le bon combat, j’ai gardé ma foi et j’espère obtenir la couronne qui a été réservée à ceux qui ont été fidèles jusqu’à la fin ». Elle pria son mari de se consoler, elle pria Dieu de le soutenir. Elle mit ses mains ensembles et tourna la tête vers la muraille et mourut quelques heures après sans rien dire (2). Son mari et les enfants furent reconduits dans leur appartement. On vint lui annoncer la sentence prononcée contre sa défunte épouse, on le mit à la porte avec ses 5 enfants non mariés dont une qui était aveugle, on ferma la fabrique, mit des scellés partout. Le grand père se retira chez son fils marié. Il tenta de faire détourner l’arrêt. En vain. On lui permit de mettre 3 chemises, l’une dessus l’autre comme aussi 3 cornettes ou coiffures pour garantir la tête. Le bourreau alla au cachot, coucha le corps sur un S de fer où il fut attaché à des crampons mais la tête passait le S, qui fut attelé à un cheval, les pieds du corps contre ceux du cheval. Le cheval est mené par le bourreau. La tête du corps heurtait sur chaque pierre. Le spectacle révolta tous ceux qui le voyaient, même les catholiques. Les spectateurs versaient des larmes car elle était reconnue pour être très digne. Elle fut traînée jusqu’en voirie où on laissa son corps. Le grand père obtint l’autorisation 8 jours après de prendre le corps. Il acheta une place dans un jardin, fit creuser une fosse et alla en cachette avec aide et un cercueil chercher le corps mort qu’il fit enterrer.

 

Tous les biens furent vendus. Un grand nombre d’habitants allèrent au Parlement prier qu’une pareille cruauté n’arrivât plus car ces procédés pourraient attirer la colère de Dieu. Le Parlement écrivit à la Cour à ce sujet. Trois corps subirent ce traitement : le premier celui d’un cordonnier (3), le deuxième un conseiller du Parlement (4) et le troisième la grand mère Bodson. Le premier corps ne fit aucune impression car l’esprit du public était enflammé de rage et de vengeance, encouragé par le clergé. Il fallait faire envisager pour criminels ceux qui professaient la religion réformée, qui pourraient nuire au clergé qui ne peut souffrir que des personnes éclairées ayant connaissance de livres sacrées, ayant en vue d’entretenir l’ignorance parmi les peuples jusqu’à les rendre idiots, qu’ils ajoutent foi aux plus grandes impossibilités lesquelles ils leur font accroître provenant des anciens préjugés des siècles observés où on inventa les fables des saints que l’on créa alors et desquels ils font des reliques et où ils ont inventé des indulgences au dépend de ceux qui les achetaient pour l’absolution de leurs péchés commis ou à commettre, et où on forgea le purgatoire où ils terminent le temps de sortie des âmes qui y sont retenues jusqu’à ce que les vivants aient assez fait dire de messes pour les en délivrer.

 

Le grand père avait beaucoup de courage, son affaire avait été très florissante mais il refusait de fabriquer à nouveau. « Laissez moi le temps de rassembler mes esprits et de sortir de l’inaction ». Il reprit plus tard un négoce en drap d’Elbeuf et de Liège pour habits d’hommes. Au moment où il faisait venir un chariot de marchandises, un faux bruit courut que la peste était dans les contrées d’où venait le chariot. On fit mener le chariot au bord de la Moselle et on l’alluma. Ce fut un coup de foudre pour le grand père.

 

Deux soeurs catholiques lui vinrent en aide l’année suivante. Cette année fut si abondante en vin qu’on donna du vin pour avoir des tonneaux. Les demoiselles conseillèrent au grand père d’acheter du vin, de le mettre en cave. Elles avancèrent 20 000 livres. Il refusa au début, disant qu’il ne pourrait jamais rembourser si le malheur continuait. Les soeurs lui dirent « Vous nous rendrez au bout de 4 ans, si cela n’a pas été bien, nous vous en faisons présent, nous sommes assez riches sans enfant ». Le grand père accepta. Il fit une forte spéculation en vin. L’année suivante, la récolte fut médiocre mais le vin ne se rehaussa guère car la garnison resta petite, les caves étant pleines. L’année suivante connut la disette en vin, la garnison fut augmentée, le prix du vin augmenta extraordinairement. Le grand père vendit son vin et gagna 100 %. Il rendit les 20 000 livres aux 2 soeurs. Le grand père put alors vivre correctement avec ses enfants. Il mourut quelques années après à un âge avancé.

 

Autre récit de la même époque

 

Mme Jassoy (5), l’épouse du grand père du mari de Susanne Morisot, était en couches quand les dragons arrivèrent. Ils voulaient le meilleur lit, ils arrachèrent la femme du lit où elle était en couches, ils la pressèrent si durement au sein qu’ils occasionnèrent un si grand mal qu’elle en eut un cancer dont elle mourut un an après (6).

 

notes

 

 

Généalogie simplifiée de la famille BAUDESSON (tous les actes célébrés à Metz sauf mention contraire)

Les personnes  indiquées « en gras » sont celles mentionnées dans le journal.

 

Jean BAUDESSON ° 25/12/1609 (+ Cassel (Hesse) 7/6/1697, 87 ans), drapier, fils d’Abraham, marchand drapier

    x 27/11/1633 Susanne LE GENTILHOMME ° 15/2/1612 + 4/12/1686

    10 enfants dont :

                                               x (2) 2/2/1681 Susanne MONTAIGU + 17/6/1689

                                               x (3) paroisse St Maximin 15/7/1691  Marie PERIN

 

 

Dans cette deuxième partie Susanne JACOB, mère de Susanne Madelaine MORISOT, raconte les évènements qu’elle a vécu pendant son enfermement pendant deux ans dans le couvent de la Maison de la Propagation de la Foi. Susanne JACOB narre ces événements à sa fille quelque temps avant la fuite à l’étranger de la famille en 1749.

 

Susanne Jacob s’adresse à sa fille "Connais-tu les archers ?". La jeune fille se rappelle alors les vilains oiseaux qui sont toujours aux trousses des protestants quand ils vont les jours de Pâques à Loudveiller (1) à la communion. Susanne Jacob dit "Quand tu les verras entrer chez nous, cours à la cachette et quand j’appellerai "lolotte, madlon, ne réponds pas. Les archers fouilleront la maison pour te chercher car on te menace de te mettre au couvent par lettre de cachet comme on m'y a mise. Je vais te raconter ce qui s'est passé. Par serment, j'ai promis sur ma vie de ne rien dire. Le jour où tu entreras au couvent, tu seras perdue pour nous. Si tu n'as pas l'esprit de te savoir rendre dangereuse aux religieuses, tu n'en sortiras pas sans miracle et tu sais qu'il s'en fait pas depuis le temps des apôtres. Car tout ce que ces catholiques romains racontent de leur prétendus miracles, de leurs saints et saintes, sont tout autant d'inventions humaines et par conséquent autant de mensonges qui servent à enrichir le clergé et à entretenir l'ignorance de la populace qui croit aux prétendus miracles autant qu'à l'évangile. Si on te mettait au couvent, il ne resterait plus rien que d'être bien rusée, de bien épier les religieuses et de faire voir aux pensionnaires tous leurs vices. Ainsi elles te trouveront dangereuse et chercheront à se défaire de toi comme pour moi ».

Note : l’histoire est racontée sous forme de scènes et de dialogues entre les différents personnages.

 

Scènes 1 et 2 : L’arrestation de Susanne Jacob

Au bas du Pont Chailli en Taison, 6 archers munis d’un papier se dirigent vers le logis d’un marchand épicier. Ils frappent à la porte de Mme Jacob et cherchent sa fille Susanne pour l’emmener au couvent.

Mme Jacob dit que sa fille n’est pas là. Les archers fouillent la maison. On entend deux voix (deux des filles) qui se lamentent sur le sort de leur Soeur Susette. Finalement, Madame Jacob avoue que sa fille dîne chez Mr Simon, conseiller au Parlement. Les archers hésitent à intervenir et donnent un délai de grâce de 24 h.

Mr et Mme Simon, leur fille et Susanne Jacob sont rassemblés dans une pièce de leur maison. Mr Simon est oncle par alliance. Susanne Jacob croit qu’elle va être enfermée à cause du curé parce que sa mère est la seule contre laquelle on peut faire quelque chose car une de ses soeurs est estropiée et l’autre trop jeune. Le curé a porté plainte à l’évêché, accuse Madame Jacob de présider des assemblées de réformés où elle fait chanter des psaumes, réciter des prières ; donc elle est suspecte. Pour l’humilier, le moyen est de mettre sa fille aînée au couvent.

Mr Simon dit qu’il essaiera d’en apprendre plus. Les archers arrivent. Mr Simon demande un délai pour aller voir le président du Parlement. L’archer montre la lettre de cachet. Le conseiller Simon ne peut rien faire. Les archers entraînent Susanne Jacob dans une chaise à porteur. Elle se défend vigoureusement en vain. Elle est conduite au couvent.

 

Scène 3 : l’arrivée au couvent

Susanne Jacob est accueillie par Soeur Elisabeth (prosélyte mise au couvent à l’âge de 12 ans). Susanne Jacob lui jette des paroles de mépris (renégate, idolâtre,.... ). Soeur Correctrice lui enjoint de se taire, la menace. Soeur Elisabeth essaie d’adoucir ses paroles. Susanne Jacob, restée seule, se lamente puis reprend courage. Dix autres pensionnaires entrent, chantent et lui accrochent ses manches :

Huguenot maudit ! que tu es misérable d’avoir quitté ton Dieu pour servir le diable.

Il faudrait cent mille fagots pour brûler tous les huguenots

Soeur Correctrice et Soeur Elisabeth entrent avec des livres (une vie des Saints, un catéchisme).Susanne Jacob les jette à terre. Soeur Correctrice et Suzanne Jacob sortent. Soeur Elisabeth, seule, se repent d’avoir été idolâtre. Soeur Correctrice revient et dit qu’elle a enfermé Susanne Jacob sur la tour, au pain et à l’eau. Soeur Elisabeth confie ses états d’âme. Soeur Correctrice veut aller parler à l’abbesse de cela.

 

Scène 4 : rencontre de Susanne Jacob et de son frère.

La scène : une rue et une partie du mur du couvent. Dans le mur à hauteur de 12 pieds rez de chaussée, une ouverture carrée en long, traversée par un barreau de fer. On voit la moitié d’un visage. C’est Susanne Jacob.

Jean Jacob, son frère, est apprenti chez messieurs Perrin, orfèvres (plus tard réfugiés à Hanau). Il fait souvent un détour pour voir sa soeur. Elle lui dit qu’elle est depuis un mois au pain et à l’eau, elle est sortie il y a 8 jours, elle porte les mêmes habits qu’elle avait en entrant (de couleur isabelle) et qu’on ne veut pas lui en donner d’autres. Elle voudrait que Mr Simon intervienne pour qu’elle puisse recevoir sa pacotille, des pruneaux, des saints-chrétiens, des mirabelles et des pommes sèches. Elle veut aussi une lettre de sa mère.

Un passant a tout entendu et décide de dénoncer Jean Jacob. Au moment où Susanne Jacob tend les lettres à son frère, des commissaires arrivent. Jean Jacob se sauve. Il est rattrapé, on le menace de la question.

Soeur Correctrice accourt vers la porte de la muraille quand Susanne Jacob veut sortir. Elle l’accuse de correspondance avec des hommes, veut les lettres qu’elle a reçues. Susanne Jacob montre son mouchoir et dit que c’était son frère et qu’il n’y avait pas de mal à ça.

 

Scène 5 : comparution de Jean Jacob devant l’évêque.

Une séance à l’évêché avec Mr Simon. L’évêque dit que Jean Jacob est passible des galères pour tentative d’enlèvement. Mr Simon dit que Jean Jacob est trop jeune, trop fluet pour faire cela. Jean Jacob comparait devant eux. Il s’explique : il passait derrière le couvent; il eut une nécessité ; il entendit la voix de sa soeur; il lui parla ; il retourna chez sa mère qui lui interdit de revoir sa soeur. Jean Jacob est depuis huit jours au pain sec et à l’eau. On fait sortir Jean Jacob et fait entrer le commissaire. On interroge le passant. On interroge à nouveau Jean Jacob Il dit que le trou a 1 pied de haut et ½ pied de large et un barreau et est 2 ou 3 pieds plus élevé que le garçon de terre. Le passant reconnaît la chose. L’évêque envoie son secrétaire vérifier les choses, voir s’il y a des échelles de corde,..... Le secrétaire revient et confirme : le trou sert à sortir les exhalaisons des commodités du couvent. Il n’a pas trouvé de lettres et d’échelles.

L’évêque rend sa sentence :

Jean Jacob sera gardé en prison jusqu’au départ du prochain chariot de poste pour Paris ou Lyon (il peut choisir); il restera au dernier poste jusqu’à ce qu’il trouve un maître. Il permet à Messieurs Perrin de le recommander à un de leur confrère.

Jean Jacob accepte la sentence et baise la main de l’évêque. Le passant est réprimandé pour sa calomnie. Le commissaire est réprimandé aussi. Mr Simon intervient auprès de l’évêque pour que le commissaire ne soit pas puni.

 

Scène 6 : la punition de Susanne Jacob

Soeur Correctrice emmène Susanne Jacob à la porte de la tour et lui ordonne de baiser les 60 marches comme pénitence. Susanne Jacob, de retour, se moque en claquant des doigts comme un grenadier. Elle reçoit une nouvelle punition : elle doit marquer du bout de la langue les bonnes marches qu’elle vient de baiser. Deux pensionnaires sont peinées de ce spectacle et regrettent leur attitude précédente (quand elles ont chanté).

Susanne Jacob est seule dans sa chambre. Elle a soif. Son coeur regorge de vengeance et de haine. Elle se plaint de son sort. Elle se rappelle les débuts de sa présence dans le couvent.

Au début, elle souffrit l'emprisonnement, eut faim et soif, elle était en risée et méprisée. Les pensionnaires l'insultaient, la chagrinaient, la turlupinaient et quand elle se plaignait à la Soeur Correctrice, celle-ci se moquait "quel dommage de se rire d'une huguenote, avouez que c'est un grand crime avec un front froncé, changez de religion et nous vous aimerons tous". La jeune fille se vengea de la première qui la tourmenta (une petite, la plus criarde de toutes) en lui donnant un soufflet sur la joue. Pour cela elle fut punie de dîner 3 jours avec les chiens. En présence de tout le monde, on mit sa portion sur une assiette à terre à coté d'un plat rempli de mangeaille pour les chiens. On se mit à table. La Soeur correctrice s’exclama "vos nouveaux hôtes vont entrer, vous pourrez vous asseoir à coté d'eux à terre et dîner avec eux, ils sont très honnêtes et fort sobres, et si votre portion ne vous suffit pas, ils vous céderont de la leur ». Sur ce, les chiens entrèrent et avalèrent la portion de la jeune fille. Tout le monde rit. Le troisième jour, elle était très faible, n'avait rien mangé. Elle chercha dans les coins s'il n'y avait pas quelque croûton.

Par la suite, elle décida d'agir différemment en se rendant utile. Elle promit d'aider les pensionnaires qui viendraient la chagriner, leur réparer leur faute dans leurs ouvrages. Idem pour la Soeur correctrice : elle la prévient de petits services, va au devant de ses volontés, lit dans ses yeux ses désirs pour les effectuer au moment qu'elle les prononce. Dans les heures de vacances, elle va aider Soeur ménagère, Soeur cuisinière, Soeur Servante, Soeur Galopin et même elle caresse les chiens.

 

Scène 7 : décès d’une religieuse.

Quand il y avait des malades, elle les soulageait. Il mourut une religieuse la première année où Susanne Jacob était au couvent. Elle assista la religieuse pendant sa maladie. On lui dit, comme elle était à l'agonie, de lui tâter le pouls et d'observer quand il remonterait. Elle se mit à la ruelle du lit pour lui tenir le bras. Il y avait plusieurs religieuses dans la chambre, la jeune fille derrière le lit ne pouvait pas être observée par celles qui entraient. La mère abbesse entra avec émotion et dit "Pensez-vous ce qui vient d'arriver, l'abbé Brayer vient de mourir; il n'a pas souffert qu'on lui donne l’extrême onction ni qu'on lui dise les litanies de la sainte vierge ni des saints. Il est mort en désespéré ce fameux persécuteur qui en a tant gagné. Il n'en a guère manqué de ceux qu'il entreprenait à convertir. On dit qu'il s'est à la fin laissé pervertir d'eux car il est mort comme un huguenot. » A ces paroles, les religieuses firent signe que la jeune fille était présente. Elle s'en aperçut, les avertit que le pouls remontait et la religieuse rendit l'âme.

 

Scène 8 : un an après, rencontre avec deux nouvelles pensionnaires.

La scène se passe dans une chambre d’audience : Soeur Correctrice, plusieurs religieuses et 2 demoiselles de condition (nouvelles pensionnaires Mlle Du Buis et Mlle Dugré, d’ancienne noblesse, cousines, qui étaient sur le point de se faire enlever par 2 officiers). Elles sont accueillies. Par manque de place, elles seront logées avec Susanne Jacob.

Les 2 demoiselles sortent. Soeur Correctrice entre avec Susanne Jacob et lui dit que s’il y a des plaintes, elle ira loger à la tour.

Les 3 filles se rencontrent et sympathisent. Les deux demoiselles disent qu’elles seraient mieux dans les bras de leurs amants. Elles pleurent car elles croient qu’elles en ont pour 10 ans. Soeur Correctrice emmène les demoiselles dans leur appartement. Susanne Jacob est contente d’avoir 2 confidentes qui haïssent le couvent. Elle prépare son plan : elle épiera les Soeurs dont Soeur Correctrice qui lui fait tricoter de nuit des gants pour le frère confesseur. Elle décide de devenir hypocrite, de cacher ses sentiments. Elle décide de se venger des Soeurs en les faisant enrager sans être soupçonnée.

 

Scène 9 : l’affaire du bouillon

Susanne Jacob dit aux deux demoiselles nobles "Après un an, je n'ai pas encore mangé une bonne soupe au bouillon car après 11 h on ôte la plus grande partie du bouillon, on remplace par de belle et bonne eau claire tout ce qu'on en a ôté et cela fait ensuite notre soupe ». Mlle Dubuis dit "Nous aurons demain le bon bouillon". La jeune fille leur dit son plan. Elle fait 3 ba()cules de bois, grille à la chandelle un peu de graisse conservée du dîner, l'attache au trébuche par une épingle, le pose sous les 3 pots et attrape ainsi 5 souris. Elle leur tord le cou et les attache ensemble. Elle va de bon matin au lieu accoutumé, coupe les pattes, le museau et la queue avec son ciseau, vide les souris et les enveloppe dans un papier séparément puis dans sa poche. Elle va à la cuisine et quand la Soeur cuisinière a le dos tourné, elle glisse les souris dans le bouilli. Elle retourne vers 11 h à la cuisine. La Soeur cuisinière prend une cuillère de bouillon et remarque des poils. Susanne Jacob confirme et leur suggère de puiser à fond. Elle en retire un papier et voit plusieurs petits os, quelques petites caudes de poils.

 

La cuisinière s’exclame "Jésus Marie Joseph, qu'est ce qu'il y a dans mon bouillon". Soeur Ménagère et Soeur Servante arrivent et voient la scène. Susanne Jacob leur suggère de vider le bouillon dans la grande terrine et d'examiner le fond du pot. Elles voient des os, du papier, des poils, des morceaux de peau. "Jésus Marie Joseph, quelle fatalité, quel guignon, que ferons nous ?"

Soeur Cuisinière dit : "Mon bon grand pot de bouillon, il doit être comme une huile, j'y ai mis toute la moelle que j'avais"

Soeur Ménagère dit  "Il faudra jeter ce bouillon, ce sera un nid de chauve souris qui y sera tombé de la cheminée, qui voudrait manger cette soupe ?".

Susanne Jacob dit "ce serait dommage, passez plutôt votre bouillon par une serviette et faites en une soupe pour les pensionnaires, je serai la première qui en mangera".

Soeur Cuisinière répond "Mais si les chauve souris sont envenimées et qu'elles en deviennent malades ". Susanne Jacob "Faites en un essai avec moi, quand vous l'aurez passé, donnez-moi en une assiette à boire et d’ici à midi vous verrez l'effet qu'il fera ".

Soeur Cuisinière "Soit, mais pour nos religieuses?".

Susanne Jacob "Faites leur une bonne soupe au vin ou quelque autre soupe maigre, je promets de ne rien dire à condition d'avoir double portion".

Soeur Cuisinière " D'accord".

Elle eut ainsi bonne portion. Les 2 demoiselles lui glissèrent la leur.

Elles dirent "Mais à l'avenir ne vous rassasiez plus à nos dépens car je sens que la soupe me manque. Chez nous, nous avions de reste mais ici on ne nous laisse pas surcharger l'estomac".

 

Scène 10 : le confesseur et les religieuses

Susanne Jacob a connaissance des intrigues des religieuses avec frère Confesseur. Elles avaient rendez-vous avec lui dans une petit chambre cachée. Quand ils étaient en affaire, Soeur correctrice restait à l'école, quand c'était un rendez-vous, elle sortait sous prétexte et confiait la place à Susanne Jacob qui sortait aussi sous prétexte. C'est là qu'elle les vit dans les soirées se réchauffer sans feu.

 

Un dimanche matin, il devait tenir la grand messe; il vint plus tôt mettre son surplis. Soeur correctrice alla le joindre dans son cabinet. Susanne Jacob regarda par le trou de serrure. Elle la vit sur le giron de frère confesseur qui l'embrassait lui tenant un discours bien doux "cet après midi, j'aurai les vêpres où je ferai un discours sur l'amour que nous devons aux saints, mais attribuez-vous cet amour de laquelle je parlerai car c'est vous que j'ai en vue, c'est l'amour que j'ai pour vous qui enflammera mon zèle".

 

Un jour, Soeur Correctrice entre dans la pièce où se tient Susanne Jacob. Elle lui permet de nouveaux habits, lui demande de distraire les demoiselles au jardin dont elle lui remet les clefs.

Frère Confesseur arrive, baise tendrement la main de Soeur Correctrice, en lui disant « Je vole, je cours, ma chère, dans vos bras, n’est ce pas j’ai bien tardé ». Il dit qu’il a rencontré les 3 jolies demoiselles.

Il demande à Soeur Correctrice si elle viendra au rendez-vous cette nuit à 2 h du matin avec lui et frère Jean. Elle répond que Soeur Ursule et elle viendront à la petite porte. Frère Confesseur demande un baiser. Soeur Correctrice dit que Soeur Ménagère a les clefs, que Mme duGré, tante des demoiselles, viendra ce soir pour faire les derniers arrangements. Ils sortent.

Les 3 demoiselles entrent alors dans la pièce, les souliers à la main. Susanne Jacob fait des cabrioles; elles rient (de rires étouffés); elles se tiraillent ; elles répètent ce qu’elles ont entendu. Mlle Dugré dit «  Ah la jolie matrone, n’a t’elle pas 30 ans, elle s’amuse à la bagatelle et nous qui avons que 17 ans, on trouve à redire que nous aimons ».

Soeur Correctrice arrive. Les demoiselles font semblant de parler; elles expliquent qu’elles ont joué et sortent. Soeur Correctrice a des doutes. Soeur Ursule arrive, elles reparlent du rendez-vous ; elles pensent qu’il n’y a pas de risque car les pensionnaires sont fatiguées.

 

La scène : la cour du couvent; nuit clair de lune; on voit le bout d’une galerie et de temps en temps apparaissent les 3 demoiselles couvertes d’un drap. De dessous la galerie sort Soeur Ménagère avec les clefs. Elle traverse la cour, va vers la porte et revient. Soeur Correctrice et Soeur Ursule vont aussi vers la porte. Elles entendent « Elles s’en vont » (c’est Susanne Jacob qui parle). Elles continuent d’avancer. Une nouvelle fois elles entendent la même chose. Elles se retirent alors dans la galerie, tremblantes. Elles cherchent rapidement. Une troisième fois une voix se fait entendre, différente cette fois. Elles traversent vite et sortent du couvent. Soeur Ménagère parait avec les clefs. Les 3 jeunes filles se mettent à l’ombre contre la muraille. Soeur Ménagère a peur, tremble, prend son chapelet, fait signe de la Croix, marmonne une prière pour chasser les revenants puis s’assoupit.

Un peu plus tard on heurte à la porte. Soeur Ménagère entrebâille la porte. Un homme parle « Comptez vos brebis, il y en a 2 qui manquent ». Soeur Ménagère se demande qui c’est ce malotru; elle a peur qu’il les dénonce aux commissaires ; elle a peur d’être punie. Si elles sont attrapées, elles seront emmurées pour le reste de leurs jours.

Soeur Ménagère « Maudit argent, vil intérêt, dans quelles transes me mets-tu. Tu m’as éblouie. Ha, chien d’argent ».

On entend heurter à la porte. Soeur Ménagère va vers la porte «  Ha, les voici, je les reconnais à leur démarche ». Elle ouvre, les 2 religieuses entrent, la porte se ferme.

Soeur Ursule dit « Soutenez-moi, je n’en puis plus; ma frayeur est extrême ».

Soeur Correctrice « ne s’est-il rien passé dans le couvent ?».

Soeur Ménagère « Rien, que vous est-il arrivé ? »

Soeur Correctrice « En mettant les pieds hors de la porte, nous vîmes un homme venir à nous. Nous tentâmes de s’éloigner. En vain, il nous suivait. Nous parvinrent à passer la petite porte ».

Soeur Ménagère raconte qu’une demi-heure après la sortie des 2 Soeurs, un homme frappa à la porte (elle raconte ce qui est arrivé). Soeur Ursule pense que les ayant vues entrer par la petite porte, il est venu avertir le couvent. Les 2 Soeurs regrettent leur sortie. Elles ne le feront plus.

A ce moment les 3 demoiselles quittent la galerie. Les Soeurs entendent du bruit. Elles croient que c’est le revenant qui les suit.

 

Scène 11 : « le miracle »

Le lendemain matin, Soeur Correctrice veut raconter à Frère Confesseur ce qui s’est passé de peur qu’il ne soit fâché de la nuit passée. Elle n’a pas dormi de la nuit et a un gros mal de tête. Elle rencontre Susanne Jacob et lui dit d’aller aux vêpres avec les 2 demoiselles

Susanne Jacob veut montrer maintenant aux deux demoiselles les Soeurs qui sont au nombre des bêtes, c’est à dire les bigotes qui croient que les âmes du purgatoire ont des intelligences avec les âmes vivantes, qu’elles ont le pouvoir de demander des messes pour la délivrance de leurs âmes.

Soeur Marie marche un livre et un chapelet à la main. Elle marmonne quelques mots inintelligibles. Susanne Jacob met son tablier à l’envers et devance Soeur Marie par une autre porte. On entend crier « A l’aide, venez, vous verrez une âme du purgatoire (elle a cru voir l’âme de sa mère). Soeur Marie raconte aux demoiselles la vie de sa mère. Puis elle s’en va en continuant de crier « Miracle, Miracle ».

 

Scène 12 : histoires de nourriture

Soeur Servante, après avoir puisé de l’eau, s’assoit sur un bloc en revenant. Elle doit porter un morceau de tourte aux mirabelles à Soeur Abbesse. Elle l’oublie en se levant. Susanne Jacob coupe un morceau et le distribue aux demoiselles.

Soeur Servante découvre qu’il manque un morceau. Elle et Soeur Ménagère décident de dire que c’est le chien de la Mère Abbesse (qui s’appelle Mignon) qui l’a mangé.

Les 3 demoiselles viennent de terminer de manger leur tourte. Susanne Jacob pense que le « miracle » d’aujourd’hui sera enregistré dans les annales, que la Soeur sera un jour mise au rang de saintes et qu’un petit morceau des ses os guérira de la fièvre ou garantira de la peste ou préservera de la colique, de ne pas se noyer en tombant dans l’eau ou le grand préservatif que les soldats portent sur eux quand ils vont en guerre pour faire passer les belles par-dessus eux.

Susanne Jacob veut aussi déguster les raisins qui poussent dans le couvent et les poulets qui y sont élevés. Pour cela, une nuit, elle les pique à l’aide d’une aiguille puis les étouffe et les dispose en rond.

Le lendemain, dans la cour. Soeur Ménagère constate que les poulets sont morts en un grand rond par terre, la tête sous les ailes, le coq étant au milieu du rond. Elle pense qu’il y a un sortilège. Susanne Jacob suggère d’aller chercher les 2 demoiselles car elles sont de la campagne. Elles disent que les poulets sont morts étouffés, tués par une martre. Comme on ne peut les donner à manger aux soeurs, Susanne Jacob propose de les donner aux pensionnaires sans le dire aux Soeurs. Soeur Ménagère est d’accord.

Plus tard, Susanne Jacob vole des mirabelles destinées à la mère abbesse.

Soeur Ménagère et Soeur Correctrice constatent que le raisin a disparu. Elles veulent une enquête sur tous ces événements.

 

Scène 13 : la punition

Les 3 demoiselles sont convoquées devant le grand consistoire.

Une salle et 3 tabourets. La supérieure demande aux demoiselles de s’asseoir, leur expliquant qu’elles vont présider la séance. Elles refusent car ne se sentent pas dignes. La supérieure leur ordonne à nouveau. Elles obéissent. Alors la supérieure s’étonne de leur audace de s’être assises en sa présence. Elle leur ordonne de se mettre à genou, les bras en Croix, une Soeur derrière chacune avec une verge à la main avec ordre de les frapper si elles baissent leurs bras. La supérieure les accuse d’avoir comploté la nuit dernière, de les avoir épiées dans leurs secrets, leurs jugements, leurs punitions ( elle fait référence à la nuit où Soeur Elisabeth a été fouettée par les autres Soeurs parce qu’elle s’est plainte à l’évêque). Elle n’est pas étonnée de la conduite de la vilaine huguenote (« pareille race de vipère ») mais elle l’est concernant les 2 demoiselles nobles.

Elle condamne Susanne Jacob au pain et à l’eau pour un mois et les 2 demoiselles aux arrêts.

 

Scène 14 : la libération.

Un mois après, la supérieure assise à une table avec une bible ouverte devant elle, les religieuses autour d’elle. Les 3 demoiselles paraissent. Elles prêtent serment sur la bible de ne jamais rien raconter ce qui s’est passé, de louer les Soeurs, de louer le règlement, de ne dissuader personne d’y entrer.

Alors les 2 demoiselles seront reconduites chez elles et Susanne Jacob sera placée chez sa tante Simon. En sortant, les 3 demoiselles baisent la main de la supérieure.

La supérieure seule. Elle est contente que le problème ait été traité à temps. Elle souhaite ne plus jamais avoir des huguenots. Elle en a eu 4 :

Les 3 demoiselles font leur adieu à Soeur Elisabeth qui n’est pas encore remise de sa punition.

Note : Soeur Correctrice fut transférée au bout d’un an dans un autre couvent pour sa mauvaise conduite.

 

Une fois sortie du couvent de la Propagation de la Foi, Susanne Jacob est placée chez Mme Simon, sa tante par alliance, femme de Mr Simon, conseiller au parlement. Il lui est interdit de voir sa mère et sa soeur. Elle fait passer un message qu'elle profiterait des nuits pour les embrasser car elle était sortie du couvent, ce qui arriva souvent. Le même soir, Madame Jacob vient voir sa fille car elle a appris qu'elle était sortie. Elle tremblait sachant qu'on ne sort pas du couvent sans avoir changé. Quelle joie de se revoir. Elle demande si elle a changé. Susanne Jacob répond qu'elle est restée fidèle à sa religion, qu'elles ne pourraient pas se voir en public, elle viendra les voir et ses soeurs la nuit. Elle est ici pour achever sa conversion. Elle doit aller à l'église. Elle obéira un certain temps jusqu'à ce qu'on ne l'observe plus. Elle demande des nouvelles de son frère, on lui a dit qu'il était à Paris. Sa mère dit qu'il est à Londres. Il est entré dans une boutique d'orfèvre à Paris. Une milady est venue faire des emplettes ; il porta l'argenterie à son domicile. Elle le questionna, s'il était né à Paris, sa religion, s'il souhaitait venir à Londres. Il dit oui. Ils y allèrent. Il fut mis chez Mr ..., orfèvre réfugié, veuf, avec une fille unique qu'il épousa tellement qu'il s'était bien conduit. Sa mère lui promet de lui montrer ses lettres.

Un peu plus tard, Susanne Jacob rencontra son futur mari. Mr Morisot, veuf, sans enfant, marchand en drap demeurant sous les arcades de la place d'armes en face de St Simplice s'enquit chez la veuve Jacob si sa fille était toujours RPR (alors il voulait bien l'épouser) ou bien si on l'avait forcée à changer de religion. La mère dit non mais dit que cela doit rester secret. Susanne Jacob accepta. Il était réformé, avait vécu 8 ans avec son épouse, 2 enfants morts à la naissance. Il avait un très bon négoce. Ils se marièrent à St Simplice selon la loi à laquelle les réformés doivent se soumettre. Madame Jacob vint s'installer chez eux avec ses 2 filles. Ils eurent 6 enfants dont 3 morts en bas âge.

 

Anecdotes sur l'abbé Brayer

Il a fait casser le mariage Morisot avec sa première épouse célébré à Bischwiller (2). Morisot avait commencé à ouvrir une boutique. La semaine après on lui ferme, met en prison les 2 époux éloignés l'un de l'autre jusqu'à se faire instruire par leur curé. Ils étaient 4 pères de famille à aller à l'instruction. Morisot pose une question au curé "Mais comment peut-il être possible que vous qui avez obtenu de votre infaillible pape le pouvoir de faire descendre Jésus Christ le fils unique de Dieu quand il vous plaît à toute heure et en cent mille lieues à la fois à l'élévation d'une hostie, comment est-il possible qu'un tel homme muni d'un tel pouvoir puisse tomber dans un péché mortel encore bien moins y mourir et aller droit en enfer, éloigné pour toute éternité de celui sur lequel il avait tant de pouvoir ?". Le curé l'interrompt, lui disant qu'il n'a pas fait attention et qu'il doit sortir. Le curé va tout de suite chez l'abbé Brayer, qui lui dit qu'il est une bête d'avoir entrepris des personnes d'esprit, que l'homme est trop dangereux, que le curé devait cesser ses instructions quelque temps et de plus faire venir Morisot.

Il y avait une jeune veuve demeurant dans le voisinage. Il l'oblige de venir à sa controverse. D'abord il ne peut pas la gagner à cause qu'il n'osait employer la force car elle était riche et qu'elle avait des amis et parents d'un rang élevé. Elle obtient d'eux d'être dispensée. L'abbé est piqué au vif, n'aime pas perdre sa renommée acquise car il est question de controverse. Quand on demandait chez qui ? Quand on répondait "chez l'abbé", on disait "il n'échappera pas". Les catholiques disaient "il est des nôtres". Il n'entreprenait personne sans être bien informé sur l'ignorance, le manque d'établissement, la jeunesse, l'avarice, le manque de fortune, l'indigence, .... Il savait tout mettre à profit, promettait tout, avait beaucoup d'esprit. Il s'était fait une loi de purger Metz des huguenots. Il peut s'attribuer d'avoir plus perverti qu'à la révocation de l'édit ou à la dragonnade. Car la force qu'on employa alors ne fit qu'aigrir les esprits et fit peupler la Prusse, l’Allemagne, la Hollande, l'Angleterre, la Suisse où on trouve partout des colonies françaises et des manufactures, des fabriques, des sciences, des richesses, ce qui fit une forte saignée à la France. L'abbé apprend qu'une voisine avait été l’amie d'enfance de la veuve, avait été à l'école ensembles. Il entreprend la voisine de convertir son amie. Il lui promet que si elle réussissait, elle ne ferait que passer au purgatoire pas plus de 24 h, que l'oeuvre méritoire lui faisait dès à présent préparer une place au ciel, que son passage au purgatoire serait pour la purifier et non pour y pâtir pour les péchés, et qu'elle épargnerait beaucoup à ses enfants qui n'auraient pas besoin de faire lire des messes pour faire sortir son âme du purgatoire. La voisine se met en action, persuade la jeune veuve d'aller avec elle à la fête de la Ste Croix. De retour, la veuve pleure, se reproche d'avoir hésité, fait des reproches à sa voisine et la renvoie, la traitant d'idolâtre, de séductrice. La voisine fait son rapport à l'abbé. Il lui reproche d'avoir fait la bêtise d'avoir amener la veuve à cette fête " les huguenots appellent les catholiques idolâtres car ils adorent une Croix". Le curé renvoie la voisine. La veuve fait rentrer ses argents et se réfugie en Allemagne.

 

Notes

 

 

 

Cette troisième partie du journal de Susanne Morisot relate la fuite de la famille et les raisons qui l’ont provoquée. Les événements se déroulent en 1749. Les termes et expressions sont ceux utilisés dans le journal à l’exception des titres qui ont été ajoutés.

 

La vie quotidienne à Metz

La famille Morisot avait à souffrir de la religion car un méchant curé forçait les enfants (1 garçon et 2 filles) à aller à l'école catholique. Ce méchant curé dut s'enfuir car il avait engrossé sa servante et accusé le marguillier par 2 témoins payés qu'il avait absout par avance de leur faux serment. L'un deux se confessa 1 an après; le prêtre lui dit qu'il ne pouvait pas l'absoudre s'il ne se dénonçait pas ; l'autre témoin fut convoqué et avoua. Le curé s'enfuit alors. Le nouveau curé ne fit pas mieux ; il était colérique, emporté, absolu de ses volontés, zélé catholique; il obligeait les enfants d'aller à l'école catholique et à la messe. La soeur aînée Morisot avait dix ans. Le maître d'école enseignait les garçons, et sa femme les filles. Le maître dit qu'on devait s'agenouiller devant l'image de la Ste vierge et des saints et saintes en lisant des litanies.

Le fils Morisot dit "ce n'est pas vrai, il est défendu dans l'écriture de s'agenouiller devant la créature, Apocalypse chapitre 12 verset 8 et (..)."

Le maître se mit en colère "comment, tu me donnes le démenti, tu sentiras mon bras, malheureux huguenot".

Le frère monta sur la banc puis sur la table, se débattit avec les autres garçons et s'enfuit au logis. Il dit à sa mère d'aller secourir sa soeur. Le maître voulut s'en prendre à la soeur, la prit par le devant de son corps de baleine, se tourna plusieurs fois avec elle, la laissa aller ; elle tomba de la tête contre une armoire et resta en défaillance. La mère arriva, se débattit avec le maître, ramena sa fille au logis et porta plainte. Les enfants furent mis à une autre école. Le fils fut mis aux jésuites en Alsace et la fille à l'école de la paroisse afin d'être instruite et confirmée. Tous les dimanches, une des filles venait la chercher pour aller à la grand messe. Elle restait jusqu'à ce que celui qui jetait l'eau bénite avant le service l'avait vue. Après, elle faisait semblant d'avoir quelque nécessité et s'esquivait quand on ne la retenait pas car il y a partout du faux zèle.

On lui disait "ne veux tu pas encore t'esquiver, petite huguenote ".

Elle restait, se mettait à genoux tout le service (sur les conseils de sa mère) afin de ne pas se mettre à genoux au moment que tout le monde s'y met quand le prêtre lève l'hostie, pour ne pas commettre l'idolâtrie. On n'observa pas cette ruse car dans une église catholique on voit des personnes assises et debout et à genoux, ces dernières le font pour réciter leur chapelet.

La maîtresse d'école était bigote, voulait faire apprendre à la jeune fille le catéchisme, les litanies et des formulaires de confession sans lui dire ce qu'elle voulait. La jeune fille ne voulait pas apprendre. Elle était punie chaque jour. Sa mère lui dit d'apprendre, qu'elle pourra oublier plus tard.

En janvier 1749 se produisit un événement qui fut à l’origine de la fuite. En allant à l'école avec sa soeur, Susanne Morisot passa le long des arcades place d'armes jour de marché aux grains à 100 pas de chez eux. Sur la place il y avait un cochon tué (les cochons sont tués à la rue devant la porte des particuliers qui les ont achetés car il y a peu de cour dans les maisons). Le cochon était couché sur 2 bûches non sciées, entouré de paille (les cochons tués en hiver ne sont pas échaudés par manque de place). Les 4 coins furent mis en feu, faisant un petit feu d'artifice qui divertit les écoliers. Les 2 soeurs regardaient. L'enterreur de la paroisse pris la Susanne Morisot par le bras et voulut l'emmener chez le curé :

 

" Monsieur le curé vous demande, venez avec moi, il vous donnera des dragées".

La jeune fille répondit  "Laissez moi, je vais à l'école, je ne veux pas de dragées".

L'enterreur la tint fermement "je te tiens ferme,petite huguenote".

 

La jeune fille refusa malgré plusieurs sollicitations. Elle lui tapa dans les jambes. Les flots qui tiennent la fausse manche de mouillons au corps de baleine s’ouvrirent en partie. Elle put retirer sa main Elle s'enfuit et se cacha sous un mulet qui avait un sac de blé sur le dos. Le maitre du mulet lui dit de ne pas rester car c'était dangereux (le mulet était méchant). Le paysan la protégea de l'enterreur en la prenant par le col. Elle partit par un chemin qui évitait l'église (elle n'osait pas retourner au logis car elle habitait en face de l'église). Elle fut poursuivie par une bande d'écoliers des jésuites emmenés par le fils de l'enterreur. Elle se réfugia chez un ferblantier ; elle sauta par accident dans un pot de charbon allumé. Le ferblantier la retira et la reconnut. Il la protégea des écoliers qui entraient dans la boutique. Il prit le fils de l'enterreur par les cheveux, le souffleta, fit chasser les autres par son ouvrier. Après 2 quartiers de chemin elle fut arrêtée par une vieille laideronne en haillon qui la connaissait. La jeune fille voulut que la vieille envoie un message à son père qu'il vienne la chercher mais la vieille voulut l'emmener chez le curé qui lui donnera des dragées; la fille donna un coup de poing et fit lâcher prise la vieille qui la tenait par le tablier. Elle courut, traversa un convoi de chariot de foin et s'affala épuisée dans sa chambre à l'école des filles. Son père arriva. Entendant la voix, elle se leva du fauteuil mais par faiblesse tomba sur ses pieds. Elle le prit par les jambes, le serra de toutes ses forces et pleura. Le père la prit sur ses genoux, l'embrassa. Il décida de la ramener par un autre chemin. La jeune fille essaya de marcher, chancela. Le père interrogea la maîtresse d’école. Elle dit que la jeune fille était arrivée il y a 2 heures et qu'elle était tombée dans la chambre, qu'elle, maîtresse, était accourue pour la relever, qu'elle l'avait portée sur le lit et 1 h après l'avais mise dans le fauteuil à coté du feu puis avait averti le père à la fin de l'école. Le père et sa fille se rendirent chez la grand mère et les 2 tantes qui pleurèrent ensembles.. Le père porta plainte ; le curé fut obligé d'arrêter ses contraintes mais obtint que la fille aille à la grand messe tous les dimanches et au catéchisme et à l'école de la paroisse. Elle apprit des litanies, le catéchisme, des prières latines. Le curé la flattait par des images et des caresses et la fit mettre sur la liste des confirmations. La maîtresse d'école devait la préparer à confesser 8 jours avant la confirmation sans lui dire. Elle lui fit apprendre des formules, la punit car elle ne voulait pas. Un matin la maîtresse l'emmena au confessional (1 ou 2 jours avant la confirmation). Elle lui dit de ne parler à personne de sa famille quand ils passeront devant chez eux. Elle la força à entrer dans l'église, la mena à un banc et dit: "Vous savez vos prières ou formules, je vous mène à confesse, vous serez confirmée dans 8 jours, je vous conduirai au confessional où vous confesserez et m'apporterez une marque, je me tiendrai derrière vous de crainte que vous ne vous en alliez comme vous faites à la grand messe ».

 

Le curé dit " Ah ma chère petite, que vous êtes sage et obéissante, je vous aime de tout mon coeur, faites vos dévotions et confessez vos péchés".

La jeune fille ne put dire un mot.

Le curé remarqua son trouble et dit "la formule ne fait rien à l'affaire, confessez vos péchés, je vois que vous n'êtes pas instruite".

Elle répondit : "mais je n'ai pas péché".

Le curé "comment, petite menteuse, voulez vous confesser ".

La jeune fille "Quand je viens de l'école à 11 h, j'ai faim, ma mère ne me donne rien, je vais à l'armoire de grand maman et je prends tout ce que j'y trouve, du bonbon, des mirabelles, des prunes séchées, des craquelins  »

Le curé "et ? ".

La jeune fille "quand je ne trouve rien, je vais à celle de ma chère mère où elle met le dessert et j'en prends. Oui, monsieur, c'est tout, je ne sais plus rien".

Le curé "mais ce n'est pas tout , je sais quelque chose, vous ne venez pas assez à l'église et au catéchisme, c'est vos parents qui le défendent ".

La jeune fille "Non, c'est moi qui n'aime pas, j'ai tout dit, je m'en vais".

Le curé "voulez vous attendre petite friponne, je ne vous ai pas encore donné l'absolution. Vous me promettez que vous viendrez régulièrement à l'église et au catéchisme, vous réciterez autant de pater et autant d'ave maria".

La jeune fille se sauva en pleurant et dit à sa mère "je suis perdue, je suis perdue".

La mère pleura, lui dit d'aller à l'école dire à la maîtresse qu'elle s'était confessée. La mère lui dit qu'ils préparaient depuis plusieurs années leur départ et qu'elle devait garder le silence. La jeune fille attrapa un Bernard à l'oeil et sa mère la garda à la maison. Une religieuse des enfants trouvés vint pour faire arrangement pour des ouvrages qu'elle faisait coudre aux enfants trouvés pour la livraison de quelque régiment qui entraient en garnison à Metz pour se "recrouter" de la défaite subie à la bataille de Delting(en) près Hanau. Madame Morisot montra à la religieuse l'oeil de sa fille qui avait eu des frissons et chaleurs toute la nuit. La religieuse la crut et dit que la jeune fille devait garder la chambre. La mère lui enveloppa la tête et la déshabilla. Elle dit que ce mal venait à propos mais que le curé viendrait sûrement, qu'elle se tienne prête à se mettre au lit dès qu'elle le verrait, de faire la malade, de lui promettre qu'elle serait la première à se ranger à sa première confirmation. "monnaie fait beaucoup mais argent fait tout". Le curé chercha la jeune fille car il ne la voyait pas dans le rang des catéchumènes. Furieux, il alla chez les Morisot. Il y avait 4 capitaines suisses en affaire avec la mère alors que le père était en affaire avec 2 capitaines français. Le curé arriva furieux. La mère lui expliqua, lui parla de la religieuse. Le curé s'emporta, demanda que la fille soit habillée.

Les officiers suisses le tournèrent en risée "pas tant de colère, cela pourrait vous nuire et nous en mourrions de chagrin. Croyez Mme Morisot, revenez dans un an, elle est encore trop jeune."

Le curé grinça des dents, ne put plus parler tellement il était en colère. Il s'en alla en menaçant de se venger. Une heure après, les confirmées passèrent. La mère remercia les officiers qui étaient réformés. La jeune fille resta en chambre 8 jours. Le curé alla porter plainte à l'évêque, lui disant qu'il était nécessaire de mettre la fille au couvent. L'évêque fut d'accord. Le curé fit faire une lettre de cachet pour un couvent. Les parents furent avertis par un ami qu'on avait écrit en cour et tentèrent de faire annuler la trame. Trop tard. Ils décidèrent alors de s'enfuir à Londres chez le frère de Mme Morisot, Jean Jacob.

 

 

La fuite

Le frère avait été mis à Bischviller chez le pasteur Heilman en échange de sa fille. La grand mère et ses 2 autres filles (les sœurs de Mme Morisot) s'installèrent ; ailleurs avec Mlle Heilmann puis se réfugièrent à Bischviller.

La servante fut mise dans le secret. Elle recevrait tous les meubles et une obligation de 200 livres payable en 1 mois et son gage pour un an. En partant Madame Morisot lui donna toutes les clés avec permission de tout prendre et de l'apporter chez le charretier qui les emmenait de Metz (c'était son parent) ainsi elle était occupée sans avoir le temps d'aller les dénoncer. Les parents vendirent sous main des marchandises en transportant sous le manteau sans trop dégarnir la boutique. Ils vendirent tout à des juifs qui l'affectionnaient car quand ils étaient sous les arcades et que la clochette annonçait le vénérable qui va chez les malades leur donner la communion, le père les appelait dans sa boutique par leur nom, faisait semblant de marchander, évitant ainsi à ceux-ci de se mettre à genoux car les juifs et les réformés qui ne le font pas sont exposés à des coups de bourrade de la garde, de la populace, des coups de poings, de pieds, ils vous remplissent de boue, jettent des pierres en criant "à genoux, huguenots, maudit juif ". Les marchandises étaient : mousseline, siamoises, basins, toiles fines et ordinaires, velour de laine ou caffa, manchettes d'homme brodées et mousselines brodées. La famille possédait une métairie à Fey. Les réformées ne pouvant pas vendre leurs biens, les Morisot imaginèrent une ruse : une demoiselle avait été créditée de 200 livres. Elle était entretenue par le pp, homme qui avait beaucoup à dire au Parlement. Le père lui demanda de lui rendre un service : il devait 4000 livres à un marchand de Liège et voulait vendre sa métairie. Si elle voulait servir de médiateur pour avoir la permission de vendre, il la rayerait alors du livre. Monsieur Morisot demanda à un ami marchand de produire une fausse dette de 4000 livres. Il accepta à condition de ne pas avoir à prêter serment. Cela marcha. Monsieur Morisot raya tout le monde des comptes.( Une seule personne ne voulut pas en profiter. Ayant retrouvé les traces de la famille à Hanau après 25 ans, elle fit délivrer à Madame Jassoy 30 livres).

 

Le père fit accord avec un tonnelier. Ils emballèrent 2 tonneaux de 20 hottes de hardes, habits, linge, vaisselle d'argent,... et les firent sortir à la pointe du jour, les faisant passer pour 2 tonneaux de vin. Ils les firent mettre en grange. Monsieur Morisot avait conclu accord avec un charretier pour les emmener à Ludveiller à 10 lieues de Metz. Il paya 4 chevaux et le chariot, donna 100 écus (c'est ce qu'on donne à ceux qui dénoncent en justice ceux qui se réfugient) et une obligation de 200 écus qu'il antidata et attesta dans ses livres. Il donna une bonne récompense au valet.

 

4 semaines avant Pâques 1749, samedi soir, veille d'un feu d'artifice et de l'illumination pour la paix, Madame Morisot envoya ses 2 filles chez Mme de Basasse, son amie, la priant de les garder . La mère dit que vers 6 h après diner la fille du charretier viendrait les chercher pour les conduire à leur père hors la ville. Ceci fut fait. Le père prit la cadette sur son dos car il avait neigé et elle pleurait, ne pouvait marcher. Sa fille Susanne l’attrapa par le pan de son manteau et ils cheminèrent la nuit une lieue de chemin jusqu'au chariot couvert de toile. Ils étaient sortis par une porte différente. Ils avaient laissé 2 grandes maisons, une sous les arcades, l'autre en Taison près le pont Chailli ; la première meublée sans les marchandises qu'ils avaient dans la boutique soit 25000 livres de bien au total. Le père avait une ceinture garnie d'or, la mère une double poche avec 17 livres en espèces.

 

La mère dit "nous quittons tout pour le salut de nos âmes. Ah grand Dieu, j'implore ton secours, fais nous la grâce de sortir heureux de Babylone où nous avons tant souffert. Voila les ordres du roi pour ceux qui se réfugient hors du royaume : le père est pendu, la femme rasée la tête par le bourreau et enfermée à vie, les enfants au couvent, les biens confisqués. Adieu Metz, adieu patrie, adieu pays. A qui en nous confisquant nos biens sous prétexte de nous convertir, vous profitez de nos dépouilles. Vous nous aurez fait supporter le joug insupportable nous donnant à la merci du clergé qui par sa superstition a su nourrir votre haine contre nous en nous damnant et vous faisant croire mille faussetés contre nous lesquelles sont toutes prouvées fausses, desquelles on pourrait faire tout un volume, et qui en vous cachant les livres sacrés sous prétexte qu'ils ne sont pas assez intelligibles pour le vulgaire, vous entretiennent dans l'ignorance et l'idolâtrie jusqu'à vous faire plier les genoux devant l'oeuvre de vos mains devant l'or, l'argent, la pierre, le bois, le plâtre des peintures, des images (Lisez Lévitique chapitre 26 premier verset : « vous ne vous ferez point idolâtre et vous ne vous dresserez point d’images taillées ni de statue et vous ne mettrez point de pierre peinte dans votre pays pour vous prosterner devant elle car je suis l’Éternel votre Dieu »). Ce clergé qui a su enflammer votre esprit de fanatisme jusqu’à vous porter à un massacre affreux le jour de St Bartholomée et à rompre la promesse signée du sceau royal à la révocation de l’édit de Nantes que vous nous avez annulé par des voies illégitimes par la force car vous n’en avez point gagné par des preuves authentiques que nous sommes dans l’erreur et que votre religion est la véritable et ceux que vous n’avez pas pu gagner par des voies injustes ne vous ont-ils pas quitté à la perte de leurs biens, de leur repos, de leur fortune, et combien n’y en a t’il pas parmi vous qui n’ont pas encore plié les genoux devant vos idoles malgré vos persécutions et les maux inexprimables que vous leur avez fait souffrir, Oh France, il n’y a pas en seul lieu de refuge où nous pûmes jouir de la liberté de conscience et d’un peu de repos. Dans tout votre enceinte autant vaste qu’elle fut vous nous avez la plupart annulés retranchés du milieu de vous, forcés à vous fuir ».

 

Après 4 lieux de chemin en de pareilles génuflexions, ils arrivèrent à un village lorrain. Ils ;étaient un peu moins en danger car on n'aurait pas pu les arrêter tout droit vu que le roi Stanislas régnait et qu'il aurait fallu sa permission. Ils arrivèrent à 2 h après minuit et restèrent jusqu'à 4 h du matin. Monsieur Morisot prit soin des chevaux. Les parents restèrent levés, les 2 enfants furent mis au lit. Une demi-heure après le départ, ils s'aperçurent que le charretier manquait. Le valet ne savait pas où il était.

Monsieur Morisot dit :" s'il est retourné à Metz et qu'on envoie la maréchaussée après nous, nous sommes perdus".

Ils étaient en transe mortelle. A 7 h 1/2, il n'était toujours pas là. Ils entendirent un bruit. Ils traversèrent alors un chemin et virent une vingtaine de paysans avec pioches et haches venir vers eux.

Monsieur Morisot dit " le charretier nous a sans doute trahis, ils sont trop mes enfants, sauvez-vous de chaque coté, dites que vous êtes de Ludweiler, demandez le chemin et allez chez le ministre qui est mon ami, il nous attend" (le père parlait à travers une fente de la toile qui couvrait le chariot).

 

Les paysans approchèrent, le charretier n'était pas avec eux, ils traversèrent le chemin qui allait à droite.

Monsieur Morisot s’exclama "Dieu merci, le danger est passé, quelle frayeur".

Madame Morisot embrassa les 2 enfants et pleura. Le charretier arriva en se frottant les yeux ; les paysans l'avaient réveillé. Ils allaient aux corvées, leur village devant n'est qu'à une 1/2 lieue. Il laisseraient les chevaux se reposer et dans 3 h seraient à Ludveiler.

Le père demanda "où étiez-vous ?"

Le charretier répondit "j'étais assis derrière le chariot et m'étais endormi"

Le père dit "Vous avez mal fait de ne pas nous avertir, et si vous étiez retourné à Metz nous dénoncer ?"

Le charretier "me croyez-vous capable d'une telle ingratitude, vous mon bienfaiteur et celui de ma mère votre servante ; je suis pauvre mais honnête homme,je ne vous trahirai pas pour mille écus. Vous seriez pendu. Est- ce que je cours pas le même risque ? Autant m'en pend à l'oeil si je suis découvert"

Le père répondit "partons mon ami".

 

Ils arrivèrent au village et couchèrent sur un lit. Ils partirent vers 11 h avant midi. Il avait dégelé. Ils prirent les chemins de village au lieu du grand chemin, devenu mauvais à cause du dégel et de grosses eaux. Ils s'égarèrent dans un bois. Ils en sortirent et virent leur erreur.

Le père s'était glissé à l'arrière du chariot et vit un cavalier de la maréchaussée avec un manteau bleu venant vers eux. Le père dit au charretier de faire marcher les chevaux mais ils étaient embourbés.

La mère cria "fouettez cocher, qu'ils crèvent, nous ne pouvons pas être loin des frontières".

Le père dit de se taire, qu'ils seraient dans de beaux draps blancs si les chevaux crevaient Le cavalier était seul, ils espéraient être quittes avec une pièce d'argent. La cavalier passa en saluant, il avait la tonsure, c'était un ecclésiastique.

Les roues étaient enfoncées, les parents descendirent du chariot pour aider, les chevaux étaient las, il se faisait tard. Le père aida, la mère se lamenta, le charretier jura, le valet tira les chevaux en criant.

Ils restèrent là 2 h. Le père ne voulait pas que quelqu'un s'en aille chercher des chevaux. Il demanda au charretier pourquoi les chevaux ne voulaient pas avancer, de leur donner de l'avoine, qu'ils attendraient 1/2 h. Le charretier répondit qu'il avait perdu l'avoine en dormant. Le père partagea un bout de pain et le donna aux chevaux. Après 1/4 h, les 4 tirèrent la bride. Ils arrivèrent à 6 h du soir à Ludveiller. Au milieu du village, un cheval tomba mort sur la place. La mère emmena ses 2 enfants chez le ministre, le père restant avec le chariot. Le ministre les aida à trouver un autre charretier pour Sarrebruck. Les affaires furent chargées le même soir. Le lendemain matin, le charretier et le valet furent congédiés. Les parents leur donnèrent une douceur. Le charretier les remercia. Les parents rendirent grâce à Dieu de leur délivrance et de leur heureuse arrivée en Allemagne. Ils remercièrent le ministre et partirent. A Sarrebruck, ils voulaient y séjourner pour attendre le jeune fils qui était à Bischwiller. Le père écrivit une lettre . Une amie vint les voir et leur recommanda de partir vite car la France pourrait les réclamer ce qu'elle avait fait pour un homme qui avait eu juste le temps de s'enfuir. La France était si puissante qu'on ne pourrait lui refuser. Le père décida de partir le lendemain et écrivit à son fils de venir à Deux Ponts. La mère remercia son amie et alla rendre visite à ses anciennes connaissances car étant jeune, elle avait passé 3 mois à Sarrebruck pour apprendre l'allemand en pension. Ils partirent donc le lendemain et arrivèrent le même jour à Deux Ponts où ils restèrent 8 jours.

 

Le fils arriva avec la grand mère et sa fille Charlotte,tante des enfants. L'ainée Anne resta à Bischviller car elle était incommodée. La mère dit qu'ils voulaient aller à Londres d'où son frère lui avait écrit ,ils voulaient y établir un négoce comme à Metz. La grand mère déconseilla car ne savait pas l'anglais et que ce négoce n'était bon que dans les garnisons de 20000 hommes comme à Metz ; elle conseilla d'aller à Hanau là où étaient des amis et parents, et qu'elle viendrait les rejoindre. La mère refusa. La grand mère parla au père qui fut d'accord et lui demanda de persuader Madame Morisot qu'il n'aimait pas aller à Londres et que si elle répugnait d'aller à Hanau, il la persuaderait d'aller en Suisse. La grand mère et la tante parlèrent à Madame Morisot. Celle-ci n'avait pas de répugnance d'aller à Hanau mais ne pouvait pas vivre dans l'inaction et voulait aller dans une grande ville et qu'elle avait promis à son frère.

Le père consentit. La grand mère refusa et repartit pour Bischwiller. La famille se mit en route pour Bingen/Rhin où ils prirent un bateau qui les conduisit à Cologne. Ils partirent de bon matin, le batelier et son valet. Un soldat, en semestre, demanda de venir pour rejoindre son régiment à Cologne. Il ramerait. Accord des voyageurs, le batelier était content.

C'était un plaisir pour les enfants de se voir sur un si beau fleuve garni de montagnes des 2 cotés et de descendre si rapidement car il y avait 4 rameurs dont le père. La fille Susanne le relaya parfois. Ils arrivèrent avant la nuit à Cologne; le batelier ne voulut pas rester ; il dit que c'est parce que il y avait un gros village à 1/2 lieue plus bas où ils seraient mieux et où ils seraient maîtres de repartir de bonne heure (en fait c'était pour ne pas payer des droits mais il ne leur dit pas). Le père fut d'accord. En fait le batelier les emmena 2 lieux plus loin dans un mauvais village. Il les emmena dans un cabaret où on avait dansé tout le jour et où toute la compagnie se trouvait encore à se divertir à souper. La mère demanda une chambre. Il n'y en avait pas.

Une partie de la vilaine compagnie se retira mais il resta 6 pendards de drôles et 6 vauriennes de filles. Après souper, la mère demanda à se coucher. Le cabaretier dit qu'il apportait de la paille.

Madame Morisot fut étonnée "nous ne sommes pas habitués".

La compagnie se moqua et dit qu'ils n’étaient pas meilleurs qu'eux et que d'autres honnêtes gens y couchaient aussi. La famille voulut aller ailleurs mais le batelier était retourné au bateau. La cabaretier, qui connaissait le batelier, les persuada de rester et leur donna un plumeau et des coussins. Il y avait aussi un ministre d'un village. Le cabaretier ferma la porte et se retira. Il resta 6 pendards d'hommes et autant de femelles qui se couchèrent l'un à coté de l'autre. Le père sortit brusquement 2 pistolets, les posa sur une table, s'assit sur le banc devant ses pistolets à côté de la fenêtre, posa son sac de nuit devant lui, assit son fils à coté de lui et lui dit "tu peux coucher ta tête sur le sac et dormir, quand le sommeil me viendra, je t'éveillerai et tu veilleras à ma place car nous sommes dans un endroit sujet à caution ».

Le père ne dormit pas de la nuit, l'autre race fit le sabbat la moitié de la nuit. Au lever du jour, le père réveilla sa famille, voulut sortir mais la porte était fermée à clé et il y avait des grillages de fer aux fenêtres. Il tira en l'air un coup de pistolet à travers la fenêtre. Le cabaretier arriva, le père fulminait mais on ne le comprenait pas car on ne parlait pas allemand. Madame Morisot qui parlait suffisamment demanda au cabaretier pourquoi il avait fermé à clé. Il répondit qu'il avait eu peur de cette bande joyeuse qu'il croyait être une bande de filou.

La mère dit "vous nous avez exposés, ce n'est pas honnête".

Il s'excusa et demanda qu'elle ne dise rien car elle l'exposerait aux malheurs de cette bande. Les parents ne voulurent pas déjeuner et tout le monde retourna au bateau. Le batelier dit que le cabaretier était un brave homme, qu'il n'y avait rien à craindre,qu'il ne se serait rien passé car le batelier avait veillé, le bateau étant à l'ancre devant le cabaret. Ils partirent et arrivèrent à Cologne, entrèrent dans un grand bateau public où on passe la nuit en marchant.

 

Premier séjour aux Pays-Bas

Ils arrivèrent à Rotterdam. La mère et le fils partirent chercher un interprète et pour se faire conduire chez les marchands auxquels ils avaient des lettres de change et des recommendations. La mère parla à plusieurs personnes en français et en allemand. Les personnes branlèrent la tête et se moquèrent.

La mère dit "nous sommes ici comme tombés des nues, pas une âme ne nous entend, où pourrions nous loger ?".

Un homme du commun leur proposa en mauvais français de les loger. La mère souhaita le montrer à son mari pour lui servir de truchement et l'aida à sortir leurs effets pour les mettre à la douane.

La mère avec ses enfants alla chercher les marchands.

Ils entrèrent dans plusieurs boutiques en demandant "parlez vous français ?»

Les gens les regardèrent en riant. Cela les fâcha. Elle demanda à des paysans s'ils parlaient français. Ils ne daignèrent pas les écouter. Elle demanda à un fainéant posté à un coin. Il tendit la main. Elle dit qu'elle le payerait quand il l'aura menée. Il refusa. Un passant, curieux, proposa de les conduire. Les lettres de change furent acceptées. Elles avaient été prises à Sarrebruck et à Deux Ponts sur la Hollande. Un commis leur fut donné pour s'informer d'un vaisseau pour Londres. La famille retourna vers le jeune fils qui montra au commis les effets et donna l'adresse "aux trois harengs". La famille s'y installa au 2 ème étage, très bien servie. Le lendemain, les marchands vinrent et s'étonnèrent qu'ils aient logé dans une pareille maison sans connaître leur hôte. Monsieur Morisot dit qu'ils étaient très bien, leur hôte parlait français. Les marchands dirent qu'il avait trouvé un vaisseau qui n'attendait que le vent pour partir. Le père et le fils allèrent prendre les arrangements nécessaires avec le capitaine. Ils firent mettre à bord les 2 grands tonneaux et un ballot. Le capitaine leur dit de se tenir prêts. Un des marchands les raccompagna et voulut leur montrer chez qui ils logeaient. Ils allèrent le long d'une galerie et arrivèrent à un vestibule, et par la fenêtre virent une toute autre contrée. Il ouvrit une porte où on voyait 3 tables de filles occupées à divers ouvrages. En voyant les 2 messieurs, elles posèrent leur ouvrage et les regardèrent gracieusement. Le monsieur leur parla, caressa l'une et l'autre à la joue, badina et leur dit qu'il reviendrait le soir. De retour à la chambre, il dit au père "hé bien, n'y en t'il pas d'assez jolies ? c'est que vous êtes logés dans un bor..... Vous n'avez qu'à siffler par la fenêtre, vous en verrez passer plusieurs qui vous accueilleront, votre hôte n'a sa profession que pour prétexte, aussi ne le verrez vous pas beaucoup, il est toujours sur 4 chemins ».

 

La mère voulut partir mais le monsieur la persuada de rester . Le père négocia des lettres de change qu'il avait prises pour Hollande contre des papiers pour Londres.

Ils restèrent 8 jours, s'ennuyèrent. Le capitaine vint enfin les chercher. Leur hôte leur proposa de loger chez lui s’ ils repassaient par Rotterdam.

 

La traversée

Le vaisseau descendit la Meuse et arriva à (H)elfoutscleuss pour prendre des passagers et des rafraîchissements. La famille occupait la chaute. Un matelot apporta un seau de () et attacha la table. La mère demanda en allemand pourquoi.

Il répondit en mauvais allemand plat "dans moins d'une heure vous en saurez la raison".

 

Une fois en pleine mer, ils se trouvèrent mal, le vaisseau était agité des vagues. Les 2 jeunes filles  vomirent en premier dans le seau, la mère les soutenant. Le frère suivit puis la mère elle-même. Elle comprit alors la nécessité du seau. Le père resta bien et les aida à se coucher.

Le lendemain c'était calme. En montant sur le tillac, ils virent la mer verte et unie comme une glace. On ne voyait plus la Hollande. On n'entendait plus les cris des matelots.

Une idée respectueuse nous fit contempler les oeuvres de l'être suprême, l'océan inconcevable, mes yeux étaient trop tendres pour le contempler longtemps, je les cachais.

Le capitaine dit qu'ils avaient fait 4 lieues pendant la journée. La mère demanda à un matelot de les prévenir lorqu'il verrait Londres. Le 4 ième jour, ils virent une nacelle venir à leur rencontre avec des commissaires (on voyait les côtes d'Angleterre) qui ont pour rôle d'éviter l'entrée des contrebandes. Le matelot voulut avertir Madame Morisot qui tenait la main de sa fille Susanne.

 

Le matelot prit la mère par la main et étendit son bras "voyez vous ce nuage noir ?"

Madame Morisot "où?"

Le matelot " voyez-vous dessous cette nue des pointes qu'on dirait qu'il touche"

Madame Morisot "oui"

Le matelot "les pointes que vous voyez ce sont les tours des églises, les distinguez-vous ?"

Madame Morisot "oui"

Le matelot "Hé bien, vous voyez Londres"

Madame Morisot "comment, voila Londres dessous ce gros nuage ? on dirait qu'il est posé sur ces tours, voila un terrible orage"

Le matelot "ce que vous voyez n'est point d'orage"

Madame Morisot "qu'est ce que c'est donc ? "

Le matelot "c'est la vapeur des charbons quand le temps est couvert".

La mère lui donna à boire et lui demanda d'aller chercher son mari. Le bateau entra dans la Tamise et arriva à Londres.

 

Le séjour à Londres

Un quart heure après avoir jeté l'ancre, vint une nacelle avec un passager en uniforme bleu. La mère ne le reconnut pas. L'homme monta à bord et donna le nom Morisot.

Aussitot la mère sauta à son cou "mon frère, mon cher frère, mon coeur me l'a dit".

Il embrassa sa soeur, accueillit le père et les 3 enfants. Il parla au commissaire qui nota les effets et lui donna son adresse. La barque fit une lieue.

 

Le frère Jean Jacob dit au père "il y aura au port beaucoup de matelots, bateliers et autres polissons qui reconnaîtront à vos habits que vous êtes français. Comme les 2 nations sont en antipathie, certains auront la hardiesse de vous insulter. Laissez les dire, les paroles ne font pas mal»

Monsieur Morisot répondit "j'ai un bon gond (= canne), je leur en donnerai au travers de la face, je vous promets qu'ils ne demanderont pas leur reste"

Son beau-frère dit "je vous prie de ne le pas faire car ils ne le demanderont pas mieux dans un moment vous vous seriez environnés et on vous traînerait au juge de paix. Il vous condamnerait sur le champs à 1 guinée d'amende, il en donnerait la moitié à celui que vous auriez battu et garderait l'autre moitié et vous renverrait. Le battu en ferait boire ses camarades et vous seriez la risée de la populace. Et si votre canne était de bois d'épine, vous payerez de chaque noeud un shilling extra"

Monsieur Morisot : "oh, si ce n'est que cela qu'ils cherchent, ils se tromperont, je saurai me taire, qui plus est je ne les comprendrais pas"

Son beau-frère répondit "mais il se peut qu'il y en aura qui vous insulteront en français "

Monsieur Morisot "si cela est, je n'aimerais pas d'être exposé longtemps à leurs insultes"

Son beau-frère "non j'aurai soin de nous éloigner vite, je prendrai un fiacre pour ma soeur et les filles, et vous et mon neveu irons à pied, nous ne serons plus loin de chez nous".

 

La famille fut insultée en anglais.

Un polisson leur dit en français "pourquoi venez-vous ici ? c'est pour manger le pain des Anglais, on vous a sans doute chassés de France et vous venez être à charge aux anglais, on n'a pas besoin de vos races, vous n'avez qu'à vous en aller d'où vous êtes venus, ha ha ha". Les filles entrèrent dans le fiacre, les 3 hommes s'éloignèrent vite. Le fiacre s'arrêta au coin d'une rue pour laisser passer un roulier chargé. Il y avait boutique où on vendait de l'eau de vie. Plusieurs femmes y entrèrent portant des mantelets d'écarlate ou drap rouge, et se firent verser à boire.

 

Madame Morisot dit "mais quel pays est l'Angleterre, des femmes vont en public boire de l'eau de vie sans avoir honte, quelle vilaine coutume, et quelle boue noire la hauteur d'un demi pied dans les rues, et quelle cohue de monde ! comme ils vous regardent sans vous saluer ! on dirait qu'on est à une foire. Qu'ils sont sérieux ! Quelle différence des Français ! comme ils se pressent en marchant sans faire attention à personne. Voyez cette dame en jupe baleines, ils ne daignent pas la saluer, voyez comme elle est éclaboussée, et quels souliers plats! Ah Londres,vous ne me plaisez pas ! qu'est ce que dira mon mari, nous restons bien longtemps en chemin, voila déjà une bonne demi heure que nous y sommes, ou notre cocher ne sait où demeure mon frère, ou Londres est bien grand car nous avons déjà fait une bonne demie lieue dans Londres sur la Tamise et encore ne sommes nous pas chez mon frère"

 

Ils arrivèrent enfin. La tante des enfants Morisot les accueillit avec ses 6 enfants dont 2 filles de l'âge des enfants Morisot. Elle leur montra leur chambre. Madame Morisot s'inquiéta.

La tante la rassura « .il y a 3 milles à faire, ils ne peuvent pas encore être ici"

Madame Morisot " mais mon frère a dit qu'il n'était pas loin de chez lui "

Sa belle-sœur "ce n'est pas aussi loin"

Madame Morisot "mais vos 3 milles font une lieue de France et dans une lieue de chemin je traverserais 2 fois Metz "

Sa belle-sœur «  mais Metz n'est aussi pas Londres car Londres est bien plus grand que Paris".

 

1 heure après les hommes arrivèrent. Madame Morisot prit son mari par la main pour lui montrer l'appartement.

Madame Morisot, en pleurant "pardon mon cher, je vous ai offensé".

Son mari "pourquoi, qu'avez vous, je ne vous conçois pas, qu'est il arrivé, vous a t'on fait quelque chose". Madame Morisot « non, mais je vous ai contraint de venir à Londres au lieu d'aller à Hanau ou en Suisse et je ne m'y plais pas, nous n'y pourrons pas rester". Son mari "mais pourquoi, comment pouvez-vous juger d'un pays du premier abord, à peine êtes vous quelques heures ici et vous voulez désespérer votre frère qui depuis 20 ans y est et qui s'est si bien trouvé ne nous aurait sollicité à y venir s'il n'avait cru que c'était avantageux pour nous. Cessez de vous chagriner, je verrai d'entreprendre un négoce où vous aurez de l'occupation et vos chimères se passeront ».

 

Monsieur Morisot alla parler à son beau-frère qui en parla à son tour à sa soeur, lui représentant que sa conclusion était trop précipitée. "vous n'avez vu qu'une partie de Londres et vous en jugez mal. Savez vous qu'on prétend qu'il faut être 7 ans à Londres pour pouvoir en connaître toutes les rues en sortant journellement. Venez,je vous ferai voir une maison que j'ai en vue, je crois qu'elle pourra vous convenir, c'est dans la rue la plus passante et la plus convenable pour un négoce et je suis persuadé que vous changerez de sentiments aussitôt que vous aurez plus de connaissances des avantages qu'on a d'être négociant à Londres. Nous irons ensuite chez des fabricants où vous pourrez faire emplette de la première main et dans un ou 2 mois, vous y pourrez entrer".

 

La mère suivit les conseils de son frère. La maison fut louée. Son frère demanda s'ils voulaient se mettre à l'église anglicane ou à l'église de la confession de Genève (lui était de l'anglicane, il était bon anglais). Les parents choisirent Genève. Susanne Morisot assista à son premier sermon. Elle se rappela "le vent vient et va où il doit, on ne sait pas d'où il vient, ni où il va". Le pasteur annonça qu'une nouvelle famille française était arrivée et il les nomma, leur demeure, leur négoce, et pria la communauté de leur donner leur chalandise et fit des voeux de réussite. La famille allait tous les dimanches promener à diverses promenades publiques qu'on nomme guinguette, le parc le « haha » est un jardin royal près de Londres sans enclos, à 6 pas on croit entrer partout mais tout près il est environné d'une fosse à rase terre qui vous empêche l'entrée, ce qui occasionne que les Français qu'ils y voient attrapés disent ordinairement Ha Ha

Un jour Madame Morisot emmena seule ses enfants à l'église française anglicane (un dimanche après midi). Après le sermon, elles voulurent entrer au parc.

 

Une Anglaise vint à elles "sans doute que vous avez été fouettées et marquées à Paris que vous venez ici manger le pain des anglais, voyez moi ces talons pointus et ces habits à la française, quel air cela vous donne, ces chiens de Français"

La femme disparut. Madame Morisot fut si mortifiée qu'elle retourna chez sa belle-soeur et lui dit "quand vous êtes avec nous, ce n'est qu'en anglais qu'on nous injure mais aujourd'hui c'était en bon français et bien distinctement ».

 

Sa belle-sœur  lui donna des habits à l'anglaise. Le père se plaignit aussi. On l'avait tiré par la queue, on l'avait appelé "feng d(i)g", on avait rit au nez. Toute la famille s'habilla alors à l'anglaise. Un jour Monsieur Morisot et son beau frère allèrent à une tabagie. Un anglais s'assit à coté de Monsieur Morisot et lui parla en anglais. Il ne répondit pas, haussa les épaules. L'anglais parla plus fort le croyant sourd. Le beau-frère lui dit que c'était un Français.

L'Anglais dit  "est il possible qu'un si bel homme soit un Français, qui l'aurait cru ? je l'ai pris pour un Anglais et aurais parié s'il en avait été question, quel dommage !".

Le beau-frère expliqua qu'il était réfugié depuis peu et lui dit "Israel mon ami, aussi la France ne mérite t’elle pas d'avoir d'aussi beaux habitants, si robustes, si bien bâtis ?".

Un jour ils assistèrent à une scène dans la rue. Un fiacre éclaboussa une dame habillée richement. Un monsieur galonné prit parti pour la dame et demanda au cocher de s'expliquer. Le cocher dit que c'était parce qu'elle était riche et qu'elle aurait du prendre un fiacre. Il l'avait fait délibérément. Le fiacre fut arrêté.

 

Le gentilhomme provoqua le cocher "descends et voyons si tu es brave " et lança une pièce d'argent que le cocher releva. Le gentilhomme et le cocher se déshabillèrent jusqu'à la ceinture. Un cercle fut formé. Chacun avec ses partisans. Les habits étaient gardés soigneusement par la populace. Ils coururent l'un contre l'autre avec leurs poings, l'un après l'autre fut à terre, quand il était à terre l'autre lui demandait s'il était content et s'il avait assez. Pendant ce temps, les partisans l'essuyaient, l'encourageaient disant "vous serez vainqueur". Les autres relevaient celui qui était à terre, lui disaient qu'il avait bien fait de ne pas se laisser vaincre, qu'il serait vainqueur. Le cocher alla plusieurs fois à terre. Le gentilhomme lui demanda s'il en avait assez et il répondit "oui, je suis content". Les partisans du cocher disparurent et le cocher reprit son fiacre. Les partisans du gentilhomme lui offrirent à boire dans une auberge mais il refusa.

 

Monsieur Jacob expliqua à son beau-frère "le cocher avait tort, on n'ose battre personne. Le cocher n'aurait pas été fâché que le gentilhomme lui eût donné les coups de baton qu'il aurait mérité; il aurait eu une 1/2 guinée, la moitié de l'amende. Quand on a quelque démêlé ou qu'on se croit offensé des gens de basse extraction, on ne peut pas tirer l'épée, on jette une pièce d'argent à terre, l'autre parti la lève, c'est une marque qu'il veut se battre. Les spectateurs se séparent, chacun pour l'un, les habits sont soigneusement conservés. Quand un est à terre, on n'ose pas le toucher, on demande s'il est content ou s'il en a assez. Quand il dit qu'il en a assez, si l'autre lui donne le moindre coup comme aussi quand il est à terre, la populace le pendrait, le mènerait à la Tamise et l'y plongerait jusqu'à ce qu'il soit moitié mort ou qu'il demande pardon. L'autre serait conduit à une auberge où on lui offrirait à boire et à manger sans payer ».

Madame Morisot et sa belle-soeur sortirent un jour dans une grande rue. La mère vit venir une grande foule. Elle demanda ce que c'était. La belle-soeur dit "c'est la mate, venez, sauvons nous, entrons dans cette boutique"

Juste à temps, la mate ou populace passa devant eux. Madame Morisot monta sur le (haut) de la boutique pour regarder, vit un nombre inconcevable de personnes comme une nuée de sauterelles de toutes conditions des 2 sexes, un carrosse au milieu, les gens devant la mate étaient entraînés comme par un torrent. La belle-soeur demanda ce qui se passait. On avait pendu un malfaiteur, son corps avait été vendu à un apothicaire pour en faire un squelette. Après l'avoir coupé, l'apothicaire avait vu des signes de vie, le mit dans un fiacre pour le mener chez lui pour faire des expériences pour le ramener à la vie. La populace voulut voir s'il réussirait. Le beau-frère apprit que les expériences avaient réussi et qu'après 2 heures il avait pu parler. Un riche Anglais lui avait alors demandé où il avait ressenti le plus de mal étant pendu. Il lui dit et reçut une pièce ; le riche retourna chez lui, écrivit un billet où il dit qu'il voulait voir par expérience si le malfaiteur avait dit vrai, qu'il allait à son grenier mais qu'il ne voulait pas faire de mal. Après quelque temps, on eut besoin de lui, on alla chez lui, vit son billet, monta au grenier, on le trouva pendu, on le coupa ; il était monté sur une chaise qui s'était cassée de vieillesse sous lui. Il n'eut pas le bonheur d'en revenir, il resta mort.

Les parents Morisot occupaient désormais la maison qu'ils avaient louée. Ils prirent une servante anglaise et une demoiselle à la boutique qui parlait un peu français. Le fils fut mis en pension chez un ministre près de Londres pour apprendre l'anglais, l'écriture. Monsieur Morisot s'ennuyait car il ne pouvait parler à ses chalands, il devait laisser la demoiselle qui n'avait pas la vivacité des françaises. Monsieur Morisot dut s'accoutumer à boire de la bière car on ne boit pas journellement du vin à cause de la grande cherté. Il en but beaucoup ce qui le rendit pesant et le fit trop dormir même pendant la journée ce qui fit craindre à sa femme qu'il n'ait une apoplexie. Cette façon de vivre ne lui plaisait pas; il était accoutumé à boire à chaque repas une bonne bouteille de vin, il avait eu négoce qui lui donnait assez d'occupation; il avait eu un jardin qui l'amusait et des amis avec qui il se récréait. Il avait peur de sortir seul car si on lui adressait la parole, on pourrait remarquer qu'il était français et serait exposé aux avanies du peuple. A part cela il était content, jouissait de la liberté de conscience. Il aurait préféré la Suisse ou l'Allemagne, il aurait plus aisément appris l'allemand, n'aurait pas eu besoin d'interprète puisque sa femme et son fils savent l'allemand. La demoiselle leur était à charge car on dirait que les paroles lui coûtaient de l'argent tant elle la ménageait; or dans un négoce il faut parler, les marchandises ne disent rien. Monsieur Morisot souhaitait partir tenir la foire à Francfort puis aller en Suisse. Madame Morisot alla parler à son frère qui tenta de lui faire changer d'avis, la difficulté de passer la mer en l'arrière saison et que faire des marchandises.

Monsieur Morisot dit "les marchandises non entamées seront rendues aux fabricants, les autres seront emballées, seront vendues à Francfort. Puis la famille ira en Suisse où ils achèteront un bien de campagne".

Monsieur Jacob n'arriva pas à la persuader; il en parla à son beau frère qui semblait assez disposé à suivre les sentiments de sa femme. Monsieur Jacob leur demanda de réfléchir un mois ou 6 semaines ; il s'informerait pendant ce temps d'un vaisseau pour Rotterdam.

Un certain Dumon se disant Suisse était en pension chez eux. Il revenait parfois au logis avec un chapeau plein d'or et d'argent. D'autres fois, il empruntait de l'argent aux Morisot qu'il rendait. Les parents conclurent qu'il est un joueur de profession; il était très bien rnafé avec un esprit fort enjoué et d'une très belle figure. Il avait entre 20 et 30 ans. Ils firent connaissance d'un jeune officier français qui souhaitait s'enrôler dans un régiment anglais. On lui refusa mais on lui proposa une lieutenance en Amérique. Il était marié à une jeune brabançonne de très bonne famille qu'il avait enlevée. Il leur fut conseillé d'écrire aux parents de la femme afin de faire la paix, qu'ils souhaitaient revenir chez ses parents car actuellement on leur avait refusé l'enrôlement dans un régiment anglais, qu'il était cadet de famille sans beaucoup de biens, que la solution était d'aller en Amérique mais qu'elle avait peur du trajet. Les parents de la fille répondirent qu'elle s'en aille avec son séducteur. Madame Morisot et Dumont se rendirent chez elle. Dumont dit qu'elle ne se sentait pas très bien, qu'elle logeait à 2 maisons de la leur, que personne ne parlait le français. Susanne Morisot vint aussi. Ils trouvèrent la jeune femme (18 ans) en larme et le mari (23-24 ans) désespéré de la rendre si malheureuse. Ils la persuadèrent d'accompagner son mari en Amérique. Les parents Morisot demandèrent à leur beau frère qu'il s’était renseigné sur un vaisseau. Oui, un vaisseau hollandais partait dans 3 semaines pour Rotterdam. Ils allèrent chez les fabricants leur rendre les marchandises non entamées, renvoyèrent la demoiselle de boutique, donnèrent congé à la demoiselle à condition qu'elle reste jusqu'au départ. Les meubles furent vendus, le fils revint de la pension. Le soir du départ, ils s'inquiétèrent car ils n'avaient pas reçu de nouvelles du capitaine, or la servante devait les quitter après diner. Quelqu'un était derrière la porte. C'était Constant, le valet de l'officier français qui était parti. Il était désespéré, ne parlait pas anglais, n'avait pas 4 sous pour acheter une corde pour se pendre, ne pouvait aller se jeter dans la Tamise car les rues autour étaient plein de bateliers qui se moquaient de lui. Son prêtre lui avait donné 2 sous mais il n'avait plus rien. Il avait passé la nuit devant la porte des Morisot et n'avait pas mangé depuis 24 h. Son maitre était parti depuis 3 jours, lui avait laissé son dernier argent et promit de lui en envoyer. Le maitre se croyait coupable de cette situation. Le valet dit que lorqu'ils seront plus à l'aise, ils pourront faire appel à lui et il viendra aussitôt. Monsieur Morisot proposa au valet de rester chez eux jusqu'au départ et qui'il recommanderait le valet à son beau frère. Le valet les remercia et dit qu'il ferait tout pour les contenter. Le beau-frère arriva alors et dit que le vaisseau ne serait pas prêt avant 8 jours et proposa de les accueillir chez lui. Les Morisot s'inquiétaient de ne être à temps à Francfort. Le beau-frère accepta de prendre aussi provisoirement le valet et lui expliqua qu'il devait apprendre l'anglais. Le beau-frère demanda s'il pouvait garder une des filles avec lui. Susanne Morisot voulait mais pas sa mère qui dit que son aînée l'aiderait bientôt dans son ménage car elle avait 10 ans et que la cadette était sa mignonne. Le beau-frère raconta qu'il y avait eu un incendie de l'autre coté de la Tamise mais que c'était si loin d'ici que cela n'occasionnerait aucun dérangement.

Madame Morisot dit " vous ne faites pas grand affaire quand il brûle; à Metz, toute la ville serait en alarme, il faut être anglois pour ne pas s'épouvanter".

 

Le dimanche suivant, il y eu un grand attroupement de matelot et de spectateurs dans la rue qu'on nomme Strant, qui est presque aussi large que le Zeil à Francfort et a 6 milles de longueur. A 6 maisons de là, on vit démeubler une maison : on jetait par les fenêtres des chaises, tables, armoires, miroirs, verres, couches, faïences. Une compagnie de soldats arriva pour les disperser mais ils furent renvoyés comme des p., on se moqua d'eux , on les menaça "ils osent se présenter sans officier, sommes -nous des gueux, allez, et quand vous aurez votre chef et qu'il nous parle comme à des matelots anglais, nous verrons".

On commença à démolir la maison en commençant au toit duquel on jeta les tuiles. La garde revint avec des officiers. Monsieur Jacob et son neveu allèrent s'informer. La maison était une maison publique privilégiée où les matelots pouvaient s'amuser pour leur argent, que la flotte de la compagnie des Indes était revenue depuis peu, qu'un matelot avait passé la nuit avec une de ces belles laquelle lui a volé sa montre. La matelot avait réclamé au cabaretier qui s'était moqué et avait menacé de le jeter par la fenêtre.

Le matelot dit "je sortirai par la porte mais toi tu sortiras par la fenêtre".

Il retourna à la flotte se plaindre du vol, de l'impertinence du cabaretier. Les camarades crièrent "qui est brave vienne nous venger et le jeter par la fenêtre ». 3000 vinrent, la personne offensée en tête. Le cabaretier eu le temps de s'enfuir avec toute sa boutique de filles par une autre issue. Les matelots ne le trouvant pas, décidèrent de faire sortir les meubles à la place puis de démolir la maison. L'officier leur promit justice, leur demanda de se retirer en braves matelots. Ils auraient démoli la maison si l'officier ne les avait pas apaisés, que si la montre était à Londres, elle lui serait rendue.

Après 8 jours, le capitaine vint leur dire de se tenir prêts. Madame Morisot s'inquiéta que le crieur d'heures ne parlait plus après minuit, c'est qu'après cette heure,il annonçait le vent et quel temps il faisait pour ceux qui sont sur le point de voyager sur mer car il arrive souvent que les vaisseaux lèvent l'ancre à la pointe du jour. Le 15 ème jour après l'arrivée de Constant, le beau-frère vint les prévenir que le capitaine du vaisseau les invitait à monter à bord..Le beau-frère demanda comment s'était comporté Constant. Les parents répondirent très bien, qu'il pourrait rester encore 1 mois le temps du bail et espéraient que le beau-frère pourrait le placer. Constant pleura comme un enfant, les remercia, le jeune Morisot lui avait apprit un peu d'anglais, il ne pouvait plus retourner en France car il était déserteur. Le beau-frère dit qu'il y avait possibilité d'emploi car un français commençait une tabagie et voulait traiter en même temps, il avait besoin d'un compagnon. Madame Morisot envoya Constant avec leur pacotille à une rue nommée doconiar près de chez eux, qui donne sur Tamise et de les attendre. Les Morisot allèrent prendre congé de leur parents et de leurs cousins cousines. Le beau-frère les accompagna sur le vaisseau et les embrassa en larmes. Sur la Tamise, ils virent de la fumée. Cela venait d'un incendie qui avait prit il y a 15 jours dans une brasserie et qui avait détruit 200 maisons. On voit le long de la Tamise les plus beaux bâtiments du monde et de superbes jardins publics.

 

Deuxième traversée

Le soir ils arrivèrent à Graversent où on s'arrête pour mettre à terre les passagers qui ont des provisions à faire et pour prendre à bord les commissaires qui accompagnent jusqu'en pleine mer. Monsieur Morisot et son fils accompagnèrent la chaloupe pour voir la ville.

A la nuit tombante Madame Morisot ne retrouva pas sa fille cadette. Un passager pensait l'avoir vue dans la chaloupe. Monsieur Morisot et son fils revinrent. Ils dirent qu'ils n'avaient pas vu la jeune fille. Un matelot dit qu'il avait entendu quelque chose tomber à l'eau. Madame Morisot se mit à crier. Le capitaine vint avec une lanterne. Ils cherchèrent partout. Finalement ils entrèrent dans la pièce où sont les ballots. Le père heurta du pied quelque chose de mou, c’était sa fille qui s'était endormie sur une grosse balle de marchandises. Les Morisot furent malades (de mer). Le vent forcit et cela d'un coté; le vaisseau faisait cric-crac; le capitaine était un avare, il avait trop chargé le vaisseau et n'en était plus maître. Après minuit,le paquet bot vint derrière donner son signal ordinaire pour lui faire place. Le capitaine ne pouvant pas diriger le vaisseau à cause de la pesanteur et de la force du vent, le paquet bot qui va d'une vitesse incroyable quand il a bon vent, passa à coté du vaisseau comme un éclair et fit un lec au vaisseau qui prit une grande quantité d'eau. On commença à pomper, les matelots criaient, appelaient au secours, les passagers durent aider.

Il fallu reculer des ballots pour arriver au trou fait au vaisseau. On jura contre le capitaine à cause de son avarice. Au petit matin, la situation fut rétablie. Monsieur Morisot qui n'avait jamais été malade paya le tribut (il vomit 2 ou 3 fois) mais pas tant que les autres : la fille cadette 22 fois, la fille aînée 20 fois, le fils 7 fois. La fille cadette dit en pleurant qu'elle croyait rendre son urine tant c'était amer dans sa bouche. La capitaine annonça la terre ferme ; ils avaient passé 14 h en pleine mer. Ils naviguèrent jusqu'à devant Dort où tous les passagers doivent sortir pour alléger le vaisseau car il n'y a pas assez d'eau pour faire voile jusqu'à Rotterdam.

 

Deuxième séjour en Hollande et poursuite du voyage vers l’Allemagne

Ils passèrent la nuit à Dort. Le lendemain, un bateau public les conduisit par un canal à Rotterdam. Les Morisot restèrent sur le bateau à cause de la fumée des pipes que les Hollandais font dans le bateau. Ils n'eurent pas à se repentir de ce choix car leurs yeux furent agréablement entretenus par le beauté des campagnes qu'on voit le long du canal et par la magnificence des jardins. A Rotterdam, les ballots furent déposés à la douane. La famille monta dans un bateau public pour Delft où la mère et les 2 filles restèrent. Monsieur Morisot et son fils allèrent à Amsterdam pour négocier les papiers pris à Londres sur Amsterdam contre des lettres de change sur Francfort. Madame Morisot alla loger chez un aubergiste en face de l'église française. La mère et les filles se rendirent chez Mr Bouchon, à 20 maisons de l'auberge. Elles furent bien reçues, il les invita à dîner. La mère dit qu'elle était venue l'embrasser et pour le prier de l'accompagner chez quelques amis où elle avait à faire.

 

Mr Bouchon dit "nous en parlerons à table car je ne vous laisserai pas aller. Je palleron patoi jeun volaigram enelle mas vo mascuseraye je naye ma foi quon as() cas lo luminar de mon bof es le dob parbleuf jam ban pallai massain".

 

Elles restèrent et effectivement il n'y avait qu'un gros quart de boeuf rempli de moelle bouillie avec une soupe et pour dessert des raisins de st Jean avec un tas de sucre ra(sé). Il dit qu'il s'occupait de prêter sur gages et montra 3 chambres remplies comme un lombard. La mère lui demanda de l'accompagner chez ses anciennes connaissances car elle voulait s'informer d'un frère de son mari qu'on leur avait dit être en Hollande. En passant, ils laissèrent les enfants à l'auberge; ils préférèrent rester dehors à jouer autour de l'église jusque vers la brume. Susanne Morisot prit peur en ne voyant pas sa mère revenir. Sa soeur s'assit sur un banc.

 

Celle-ci dit "la maman ne revient pas, si elle nous avait abandonnées, comme dans la fable".

Sa sœur répondit "oui, mais à l'exception qu'elle ne nous a pas emmenées au bois comme ce vilain homme qui y a laissé ses 2 enfants sous prétexte qu'il voulait leur aller chercher des cerises. Mais ce qui me le fait croire c'est que mon cher père et mon frère sont en allés, il est vrai qu'ils ont dit qu'ils allaient à Amsterdam mais ils peuvent bien sur en allés plus loin. N'est ce pas la maman nous a dit qu'elle reviendrait dans une demi heure et voici la nuit et elle n'est pas encore la, elle ira sûrement les suivre et nous abandonnera. Encore si elle nous avait laissées à Londres, mon oncle voulait me garder."

La soeur répliqua "et moi, je serais bien malheureuse"

Susanne Morisot " ho non, elle ne t'aurait sûrement pas abandonnée car tu sais bien qu'elle t'aime plus que moi". Elles se mirent à pleurer. Elles

La sœur dit  "le vilain Mr Bouchon qui a emmené ma chère mère".

Elles n'avaient pas vu que la fenêtre était ouverte devant laquelle elles étaient assises et qu'il y avait une dame qui les avait entendues parler et dont le nom avait été cité par la soeur. Elle ferma la fenêtre. Les soeurs s'enfuirent épouvantées vers l'église.

 

La fenêtre s'ouvrit et la dame dit "venez, venez, petites françaises".

La porte s'ouvrit, une servante les prit par la main et les fit entrer dans une belle chambre meublée. Il y avait un grand fauteuil où était assis un vieillard.

La dame dit "venez mes enfants, si votre maman s'est en allée avec Mr Bouchon, je vous prendrai pour mes enfants ". Elle les mena au vieillard et demanda leur nom.

Susanne Morisot dit "je m'appelle Morisot et nous sommes de Metz et nous venons de Londres, mon cher père s'est en allé avec mon frère à Amsterdam"

 

Sa sœur ajouta  :"et le vilain Bouchon est en allé avec ma chère mère, à cette heure nous sommes perdues".

La dame les montra à son frère qui était sourd. Elle lui cria à l'oreille que c'était les 2 filles de Mr Morisot de Metz.

"Donnez moi mes lunettes que je les voie ". Il les examina de haut en bas. "où est donc votre mère ? "

Susanne Morisot répondit "Mr Bouchon l'a emmenée"

Le vieillard dit "qu'est ce qu'elle dit ma soeur ? mon frère l'a emmenée ?"

Mlle Bouchon ajouta  "c'est de  notre frère qu'elle dit que c'est notre frère  qui a emmené sa mère"

Il branla la tête "hum, hum ! fais leur donner à manger ".

 

La servante leur fit des soupes dorées puis des jouets.

Vers 8 h du soir elles entendirent leur mère crier "lolotte ! Nanette ! mes enfants, venez, où êtes vous?"

La mère entra et les filles se jetèrent sur elle l'embrasser. La servante invita la mère à souper avec Mlle Bouchon. La mère dit au Sr Bouchon "n'est ce pas Mlle et Mr votre frère qui me vont inviter à souper"

Il répondit "oui, c'est les mêmes, mon frère et ma soeur"

Madame Morisot dit "hé bien venez, nous irons ensemble "

Il refusa car ils étaient brouillés depuis 15 ans.

Madame Morisot dit "et aujourdhui vous vous réconcilierez pour l'amour de moi. Comment ! des frères et soeurs brouillés depuis 15 ans ? ah que cela me chagrine. Faites moi ce plaisir, venez, je vous raccommoderez".

Elle l'entraina bon gré mal gré, il fut reçu à bras ouvert; ils restèrent très tard à table où ils eurent tant à parler. Mlle Bouchon les invita pour le lendemain. Madame Morisot dit qu'elle n'avait pas depuis longtemps passé une si agréable soirée. Elle dit qu'elle avait demandé à l'aubergiste pourquoi il n'avait pas fait rentrer les filles à la nuit. Il avait répondu grossièrement qu'il n'était pas leur gardien, qu'elles avaient couru toute l'après midi à la rue et que leurs souliers étaient si crottés qu'elles lui auraient gâté sa chambre. Le lendemain Mr Bouchon le cadet et les Morisot revinrent dîner chez Mlle Bouchon où ils passèrent le reste de la journée.

Ces frères et soeurs Bouchon sont ceux que Messieurs Hauchard d'ici (de Hanau) ont hérité. Monsieur Morisot et son fils revinrent le lendemain d’Amsterdam. Il avait appris le décès de son frère marié sans enfants. Il avait été capitaine de vaisseau. Il n'avait pas eu de nouvelle de son autre frère. L'un s'appelait Elie,l 'autre Louis. Madame Morisot ordonna à ses filles de rester à l'auberge défense de sortir. Le père, la mère et le fils allèrent prendre congé des Bouchon. Ils partirent avant midi de Delft et arrivèrent à Rotterdam où ils passèrent la nuit chez un traiteur français. Le lendemain matin ils transportèrent leurs ballots dans un grand bateau public et allèrent jusqu'à Nimègue. Le traiteur leur donna du pain blanc et quelques provisions, leur disant qu'ils ne trouveraient pas de pain blanc entre Rotterdam et Nimègue , qu'il faudrait manger du pomperniquel. Ils remontèrent le Rhin mais ils allaient lentement car les eaux étaient basses. Ils restèrent en chemin sur la gravier . Les passagers durent descendre. Ils étaient devant un village. La mère voulut aller acheter du pain blanc, demanda à un boulanger qui répondit qu'on ne mangeait pas de pain blanc dans son village et lui montra du pomperniquel.

 

La mère dit "quel pain en comparaison du pain anglais, il est bon pour des chevaux"

Le boulanger dit "et qui vous a dit de venir ici ? pourquoi n'êtes vous pas restés en Angleterre ? je me soucie bien de vous vendre du pain, allez vous promener , vous n'aurez pas de mon pain". Il referma sa fenêtre.

Madame Morisot était très en colère contre ce grossier hollandais.

 

Ils arrivèrent en vue de Nimègue. La mère donna son dernier demi pain blanc à un pauvre garçon de métier qui avait eu la fièvre la nuit précédente. Ils restèrent 6 h ainsi plantés sur un banc de sable. Ils arrivèrent enfin à 3 h de l'après midi. Ils cherchèrent une auberge pour dîner mais chaque fois on les renvoya car « le balai avait été passé après le dîner et les enfants gâteraient les chambres ». Finalement ils mangèrent dans une gargote où ils furent assez mal traités. Ils firent accord avec des rouliers pour mener leurs marchandises à Cologne. Ils partirent le même jour. Le lendemain à dîner, ils arrivèrent dans un petit village où il n'y avait qu'une auberge. On leur dit qu'il y avait dîner (des noces ?) et qu'on ne pouvait pas leur donner. Madame Morisot retint son mari d'utiliser sa canne contre le cabaretier. Il dit "n'avons nous pas bien du guignon d'arriver à une heure de dîner à un petit mauvais village où nous serons obligés de jeûner ?" Madame Morisot regarda par dessus la demi porte et vit du feu et des pots qu'elle découvrit. A la fin, elle vit des fèves et à coté, du cochon salé. La paysanne survint étonnée. Madame Morisot "Bonne femme ,combien coûte votre pot de fèves et votre viande salée"

La paysanne "c'est pour deux dîners et mes gens viendront bientôt des champs, ils ont aussi faim que vous et veulent diner aussi bien que vous"

Madame Morisot répondit "eh bien, vendez moi en la moitié et cuisez leur demain frais".

La paysanne demanda pour la moitié de son dîner environ 6 batz et leur permit de venir dîner chez elle. Madame Morisot alla chercher les autres. Monsieur Morisot  fit venir à boire du cabaret et versa rasade à la famille paysanne. Puis ils continuèrent le voyage jusqu'à Cologne où ils arrivèrent avant la nuit. Un ami du frère leur conseilla de continuer jusqu'à Mayence. Il fit transporter leur marchandises dans un bateau qui devait partir le lendemain. Ils passèrent la nuit à Cologne; c'était une très vilaine ville en comparaison de Rotterdam, bâtie à l'antique de vilaines rues (des maisons à l'antique), tortue, bossue, sale et boueuse. Le lendemain ils embarquèrent. Le temps était magnifique. La navigation sur le Rhin en septembre est un des plus beaux prospects qu'on puisse voir, bordé d'une chaîne de montagne remplies de vignobles où les ouvriers ressemblent en grandeur à des petits enfants. En approchant du trou de Bingen, ils sortirent du bateau et allèrent à pied. Ils virent la tour aux chats et le défilé de rochers qui traversent le Rhin et où le courant écume en passant par dessus. Ils arrivèrent à Mayence. Ils apprirent que la foire de Francfort était finie depuis 8 jours. Ils prirent un charretier pour Hanau avec condition de passer à Francfort. Là les parents allèrent chez messieurs Sarasin leur montrer les lettres de change prises à Londres sur Amsterdam et d'Amsterdam sur Francfort qu'ils reconnurent comme bonnes.

Monsieur Morisot demanda conseil, il avait des amis à Hanau, Monsieur Marion, Messieurs Jassoy qu'ils connaissaient à Metz.

On lui répondit "Monsieur est mon propre parent, je vous conseille d'aller passer l'hiver à Hanau. Vous pourrez au printemps tenir la foire de Mayence et puis celle de Francfort. Il se peut que pendant l'hiver vous trouverez à vous établir à Hanau , emmenez vos marchandises, vous pourrez en débiter une partie. Prenez conseil chez mon cousin Marion ».

 

La famille alla donc à Hanau et s'installa aux "3 lièvres". Ils se firent mener chez Mr Marion où ils furent bien reçus. Ils racontèrent qu'ils voulaient aller en Suisse mais avaient des marchandises : calamang, étoffes en demi soie, camelot en boutons dorés, en lime, le tout fabriqué en Angleterre. Justement un marchand nommé Busin voulait quitter son négoce. Il serait possible d'acheter le reste de ses marchandises (café, thé, sucre, amandes, raisins) et de louer la boutique avec la demi maison. Marion s'engagea à prendre des informations. La famille se rendit chez Mr Giffardie, Mr Jassoy, Mme Joyeu, Hauchar la veuve, leurs cousins. Les uns leur conseillèrent de rester, les autres de partir. Mr Marion leur conseilla de rester. Les parent louèrent donc la boutique et une partie de la maison. Madame Morisot écrivit aussitôt à sa mère l'invitant à venir dès qu'ils auraient réponse. Elle fut surprise de recevoir des nouvelles de Hanau. Elle promit de venir avec sa fille aînée, la cadette s'était marié avec Mr Rason commis des vivres à Strasbourg. L'hiver se passa bien. Ils allèrent au printemps à la foire de Francfort et de Mayence. Puis ils apprirent de Marion que Mr Preye (raye) venait de mourir et que sa veuve voulait vendre sa maison et sa boutique. Accord pour 3000 florins qui furent payés quand ils furent inscrits comme bourgeois. Après paiement, Mme Raye emmena les parents et le fils à Francfort pour les présenter à ses acheteurs. Les parents achetèrent pour 1000 florins. Ils n'eurent pas besoin de tenir les foires (ils débitèrent le reste des marchandises anglaises), ayant assez de débit dans le nouveau négoce d'épicerie qu'était celui de Mr Busin mais augmenté de plusieurs articles. Madame Morisot écrivit à sa mère pour lui dire qu'ils étaient installés définitivement. Elle arriva avec sa fille aînée boiteuse en 17.. En quittant Metz, la famille avait laissé à Mlle Baucaire leur cousine les lettres de change qu'ils avaient à prétendre sur les régiments suisses auxquels ils avaient fait livraison en garnison à Metz au retour de la guerre en 17.... Mais Madame Morisot l'avait dit à leur servante qui alla dénoncer en justice 1 an après. Mlle Baucaire fut convoquée en justice jura, qu'elle dénoncerait tout de ce qu'elle aurait des Morisot. Elle remit les lettres de change qui furent données à la régie. Come elle était riche, elle fut quitte sans en payer la mete.(la moitié ?)

 

Un jour, de retour de Cassel, Madame Morisot vomit à Hanau, indisposée, car en chemin elle avait eu un refroidissement. Le chariot de poste étant tombé en chemin et rompu une roue. Madame Morisot resta 2 heures hors du chariot, les pieds dans la neige. Elle prit froid. Ses jambes enflèrent, elle cracha du sang. Elle ne demanda pas de médecin. Elle traîna quelques années, tout son sang devint en eau, elle enfla par tout le corps et mourut hydropique en 175... Le père veuf, sa belle-mère et sa belle-sœur conduisirent le ménage. Il y avait un commis (l'ancien chaput) dans la boutique et le fils conduisait le négoce.

Monsieur Morisot acheta le jardin qui revint en partage à Mme Jassoy, sa fille. Il voulait en faire un vignoble mais il échoua car le terrain était trop graveleux.

 

 

Pour terminer la « saga » de la famille Morisot, il était intéressant de montrer les pièces officielles du procès intenté par la justice royale contre eux. Les transcriptions sont présentées dans l’ordre chronologique à l’exception des 4 lettres personnelles saisies par la justice qui sont renvoyées à la fin de cet article.

 

Note : la forme et les termes employés sont ceux utilisés dans les actes. Seules quelques ponctuations ont été ajoutées quand cela était nécessaire à la compréhension des textes. Les 4 lettres personnelles ayant une orthographe et une grammaire assez déroutantes, il est plus facile de les lire à haute voix pour une meilleure compréhension.

 

 

10/3/1749 : Demande d’ouverture d’enquête par le procureur du roi par suite de la nouvelle de la fuite de la famille Morisot

A Monsieur le lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz

Remontre le procureur du Roy audit siège que par le bruit public il est venu à sa connoissance que le nommé Morisot marchand bourgeois de cette ville et sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée se sont retirés dans les pays étrangers et sortis des terres de la domination du Roy encore que par l’édit du mois d’aoust 1669, les déclarations et ordonnances rendues en conséquence et notamment du huit novembre 1713 il soit fait deffances à tous les sujets de la dite religion ou nouveaux convertis de sortir du royaume sans une permission expresse de sa majesté signée de l’un des secrétaires d’état, et comme la maison occupée par ces particuliers est actuellement abandonnée et qu'il n'y reste qu’une servante, à ces causes ...

Je requiers pour le Roy qu'il soit informé de la dite sortie circonstances et dépendances et qu'il soit par vous procédé à l’apposition des scellés nécessaires en ladite maison avec établissement de commissaire pour seureté des effets titres et papiers qui y seront trouvés. A Metz le 10 mars 1749.

Michelet de Malvoisin

 

10/3/1749 :  décision d’apposition de scellés et de comparution de témoins

Soit fait ainsi qu'il est requis à l’effet de quoy nous nous transporterons cejourdhuy deux heures de relevée accompagné dudit procureur du roy et de notre greffier dans la maison dudit Morisot pour y apposer les scellés et pour l’information ordonnons que les témoins seront assignés à comparoir par devant nous chambre du conseil du bailliage à demain neuf heures du matin deux de rellevée et jours suivans même lieu et heure. A Metz le 10 mars 1749

Gillot

 

10/3/1749 : apposition des scellés dans la maison de la famille Morisot

Cejourdhuy dixième mars mil sept cent quarante neuf deux heures de relevée, nous Benoist Gillot écuyer conseiller du Roy lieutenant criminel au bailliage et siège présidial de Metz, nous sommes transportés dans la maison du sieur Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et la demoiselle son épouse, scituée sous les arcades de la place St Louis de cette ville pour l’exécution de notre décret apposé au bas de la remontrance du procureur du Roy en ce siège dujourdhuy, accompagné dudit procureur du Roy et de nostre greffier commis audit siège, à l’effet d’apposer les scellés nécessaires attendu l’absence dudit sieur et demoiselle Morisot, où estant et ayant été introduit dans une chambre basse prenante jour sur la cour, nous avons fait apposer quatre sceaux sur deux bandes de papier, et sur une armoire murer les volets de chêne, n’ayant point fait apposer de scellés sur une autre armoire bois de chêne qui s'est trouvé dans la ditte chambre attendu qu’il ne s'est rien trouvé dedans tout ouverte, non plus que sur le volet d’une autre petite armoire murée à costé où il ne sest pareillement rien trouvé, laditte chambre estant attenante à la boutique dans laquelle estant entré l’avons trouvé fermée sur la rue, et sur la porte de laquelle nous avons fait apposer deux sceaux sur une bande de papier en dedans de la dite boutique, ensuite avons fait fermer la porte vitrée qui donne dans la ditte chambre sur laquelle nous avons aussy fait apposer deux sceaux sur une bande de papier ; de là nous avons été introduit dans une chambre haute où nous avons trouvé une commode fermante à trois serrures dans les tiroirs de laquelle nous n’avons rien trouvé et par conséquent n'y a été apposé aucun scellé, dans un cabinet à costé nous avons aussy trouvé une armoire en bois de noyer à l’antique ouverte et dans laquelle n’ayant rien trouvé n'y a été apposé aucun scellé, dans une autre chambre prenante jour sur la cour nous avons aussy trouvé deux armoires ouvertes et remarqué qu’il n’y avoit rien, nous n'y avons fait mettre aucun scellé ; de la même avons été encore été introduit dans une chambre à l’étage supérieur où nous avons trouvé cinq coffres de bois ouverts et dans lesquels il n'y avoit rien par conséquent n'y a été apposés aucun scellés, dans une autre chambre se sont aussy trouvés deux autres coffres ouverts et dans lesquels ne s'est rien trouvé et pour ce n'y a été apposé aucun scellés ; en ayant trouvé deux autres aussy ouverts dans cette dernière chambre, dans lesquels se sont trouvés des hardes et effets à l’usage de la servante, qu'elle a déclaré luy appartenir ; ayant remarqué que dans la première chambre haute où est la commode il y a une tapisserie de verdure, un lot garny de serge bleu brodé d'un gallon blan, deux couvertes de taille picqué teinte, une couche bois de hestre, une paillasse un matelas de crin et laine, un lit de (couty), deux petits travers et un oreiller de même, tous lesquels sceaux ensemble les meubles et effets en évidence non scellés nous avons laissés à la garde et dépost de Louis Haillecourt huissier en ce siège qui s'en est chargé et promis de représenter le tout sain et entier et par serment quand il en sera requis, et à l’instant nous a été représenté par le dit procureur du Roy un pacquet dans une enveloppe décacheté à l’addresse de Mr Pacquin avocat au parlement,renfermant deux papiers l’un contenant une lettre de change du montant de quatre cent livres payable audit Morisot à l’ordre du Sr des Bergeries chargé du détail de la compagnie de llet au régiment de Coisten, approuvée par le major dudit régiment en datte du 3 avril 1745 et signé au dos Morisot, le second estant une lettre addressée audit Morisot dattée de Landau du 12 avril 1748 et signé Cousten major lequel pacquet le dit procureur du roy nous a déclaré luy avoir eté envoyé en cet état cejourdhuy par ledit Pacquin ; après laquelle représentation avons paraphé les dittes deux pièces, et fait paraphé par le dit procureur du Roy, et icelle jointe au présent procès verbal pour y servir et valloir ce que de raison de tout quoy a été dressé le présent procès verbal que le dit procureur du Roy a signé avec nous et ledit Louis Haillecourt les jour et … d’autre part

 

 

11/3/1749 : assignation à comparaître pour différents témoins

L’an 1749 l'onzième mars avant midy en vertu du décret de Mr le lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz du jour d'hier et à la requête de Mr le procureur du Roy audit siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion all'encontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme accusés, qui fait élection de domicile en son hôtel seize rue de la petite Croix d’Or paroisse St Martin, je huissier au même siège demeurant rue de Juif rue paroisse Ste Croix soussigné ay donné assignation à Elisabeth George fille servante dudit Morisot et Magdelene femme au nommé La Carrière chartier bourgeois de Metz, au nommé Potier cordonnier bourgeois de cette ville et à Mr Pacquin l'ainé advocat à la cour à comparoir cejourdhuy deux heures de relevée en la chambre du conseil dudit bailliage de Metz pour estre oui en témoignage et déposé()  vérité sur ce qu'il seront enquis moyennant  ……………….

 

11/3/1749 : audition des témoins

Informations faittes par nous Benoist Gillot écuyer conseiller du Roy lieutenant criminel au bailliage et siège présidial de Metz, à la requête du procureur du Roy aux mêmes sièges plaignant en cas de contraventions aux Edits et déclarations du Roy pour cause de religion, all'encontre de Jean Morisot, marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs auxquelles informations nous avons procédé en la chambre du conseil des dits sièges et fait rédiger comme s'ensuit par Mr Joseph Berteau greffier commis desdits sièges.

 

1 - Elizabeth George fille de François George vigneron demeurant au village de Vantoux, et elle qui dépose servante au sieur Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville, sous les arcades de la place St Louis paroisse St Simplice âgée de vingt un ans ou environ témoin assigné par exploit de Haillecourt huissier en ce siège dujourdhuy avons apparu après serment presté et enquise

A dit qu'elle vient de déclarer sa qualité, au surplus n'estre parente alliée servante ny domestique des parties et dépose sur les faits de la plainte dont nous luy avons donné lecture, qu'il y a deux ans et demy ou environ qu'elle demeure chez le dit Sr Morisot en qualité de servante, lequel Morisot elle a crû de même que sa femme estre de la religion prétendue réformée, d'autant qu'elle ne leur a jamais veu faire auncun acte de catholique n'allant ny l'un ni l'autre à la messe, que pendant le carnaval dernier elle a ouit dire à la femme dudit Morisot que si elle s'en allait avec son mari et sa famille, peut être passeraient ils la mère sans s'expliquer autrement. Que depuis plusieurs mois elle s'est appercu qu'ils vendaient leurs meubles de la main à la main aux personnes qui se présentaient tant juifs qu'autre et argent comptant, et que le plus fort a esté vendu pendant la semaine dernière jusqu’au samedy dernier vers quatre ou cinq heures après midy qu'ils sont partys de cette ville avec deux enfants qu'ils avaient fait partir devant, ayant recommandé à la déposante de prendre garde à la boutique jusqu’au lundy suivant que l'on viendroit saisir chez eux qu'au moment de leur départ le dit sieur Morisot luy donna une lettre pour porter au Sr Pacquin avocat en cette ville, qu'elle luy porta ledit jour, scait aussi qu'ils ont fait plusieurs ballots de leur meilleur effet et linge, qui sont partis sur une voiture le vendredy précédent, et conduit par le nommé Jean La Carrière voiturier de cette ville demeurant au Champé, qu'est tout ce qu'elle a dit scavoir lecture faitte de sa déposition a dit qu'elle contient vérité y a persisté de ce interpellé déclaré ne scavoir écrire de ce enquise et requis taxe

 

2 - Magdelaine Goullon femme de Jean La Carrière voiturier en cette ville y demeurant rue du Champé derrière les Minimes paroisse St Euquaire âgée de cinquante cinq ans témoin assigné par exploit comme dessus du dit jour avons apparu après serment presté et enquise

A dit n'estre parente alliée servante ny domestique des parties et dépose sur les faits de la plainte dont nous luy avons donné lecture, que vendredy dernier l'après midy passant devant la boutique du sieur Jean Morisot marchand en cette ville sous les arcades de la place St Louis, la femme dudit Morisot l'apella et luy demanda si son mari avoit des bons chevaux pour faire un voyage de quinze lieues, que luy ayant dit qu'il en avoit des bons, elle y envoya son mari le soir et à son retour dit à la déposante qu'il avoit fait marché avec lédits sieur et dlle Morisot pour aller à quatorze ou quinze lieues, que le samedy vers quatre heures du matin l'on a aporté chez la déposante des couchages et plusieurs sacs remplis d’effets et de linge qui ont esté chargés sur un chariot à échelles et sont partis vers quatre heures après midy sans scavoir où ils sont allés, a seulement ouit dire à la dlle Morisot qu'ils alloient voir sa mère sans luy dire l'endroit où elle estoit ; qu'est tout ce quelle a dit scavoir lecture faitte de sa déposition a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellée déclaré ne scavoir écrire de ce enquise et requis taxe

 

3 - M Jean Baptiste Pacquin avocat au parlement demeurant en cette ville rue de la Princerie paroisse Ste Croix âgé de vingt sept ans témoin assigné par exploit comme dessus du dit jour avons apparu après serment presté et enquis

A dit qu'il est cousin au troisième ou quatrième degré à la femme (1) du sieur Jean Morisot, au surplus n'estre parent allié serviteur ny domestique des parties et dépose sur les faits de la plainte dont nous luy avons donné lecture

Ne rien scavoir sinon que depuis plusieurs années la femme du dit sieur Morisot luy auroit témoigné de temps en temps avoir des inquiétudes sur l'impossibilité où elle estoit d'exercer librement sa Religion prétendue réformée dans laquelle elle estoit née, et avoir des dispositions à se retirer, à quoy le déposant se seroit toujours opposé en luy représentant les suittes qui pouroient en résulter à quoy elle a paru pendant quelques temps vouloir defferer, que cependant depuis peu elle parroissoit avoir repris son ancien dessein, que le samedy huitième de ce mois entre deux et trois heures après midy, la ditte Morisot luy envoya par sa servante un paquet cacheté dans lequel s'est trouvé un billet portant somme de quatre cent livres dus par le major du régiment de coust() avec une lettre du dit major en datte du 12 avril 1748, qu’ayant appris depuis que la dite Morisot et son mari s'estoient retirés avec leur famille, il a cru devoir remettre ladite lesdits lettre et billet entre les mains du procureur du Roy, comme effectivement il l'a fait, et reconnoit que la lettre et billet joint au procès paraphés par nous et le dit procureur du Roy, que nous luy avons représentés sont celles que la ditte servante luy a apportés et qu'il a remis audit procureur du Roy ainsi qu'il vient de s'en expliquer; qu'est tout ce qu'il a dit scavoir lecture faitte de sa déposition a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé signé et refusé taxe

Pacquin, Gillot, Berteaux

Note : (1) : né à Metz en 1721. Ses grand-parents paternels Jean PACQUIN et Elisabeth BAUDESSON étaient protestants, celle-ci étant la sœur du grand père maternel de Mme Morisot, David BAUDESSON

 

4 - Nicolas Potier maître cordonnier demeurant en cette ville rue du Change paroisse Sst Simplice, âgé de quarante cinq ans témoin assigné par exploit comme dessus du dit jour avons apparu après serment presté et enquis

A dit n'estre parent allié serviteur ny domestique des parties et dépose sur les faits de la plainte dont nous luy avons donné lecture, que depuis environ six mois il scait que les sieur et demoiselle Morisot avoient dessein de sortir de cette ville pour se rendre à Strasbourg où le dit Morisot luy dit qu'il espéroit avoir de l'employ au moyen de son beau frère qui estoit secrétaire de monsieur l’intendant, qu’il a ouit parler de ce voyage plusieurs fois depuis ce temps, qu'au mois de janvier dernier et au commencement de ce mois il a acheté dudit Morisot tout le vin qu'il avoit et luy a payé comptant une somme de neuf cent trente une livres, que vendredy dernier la dlle Morisot luy demanda deux tonneaux secs qu'elle luy en donnerait deux frais, ce qu'il a fait, et a veu mettre dans lesdits deux tonnaux sec du linge qui estoit dans sa cave, vendit le dit jour au déposant six chaises et un fauteuil de moquette, que le samedy suivant passant devant la boutique dudit Morisot vers trois heures après midy, ce dernier embrassa le déposant et luy dit adieu sans luy en dire davantage, a appris le jour d’hyer que le dit Morisot estoit partit avec sa femme et ses deux enfants, qu'est tout ce qu'il a dit scavoir lecture faitte de sa déposition a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé signé et requis taxe

Nicolas Pottie, Gillot, Berteaux

 

 

15/3/1749 : assignation d’un autre témoin

L’an 1749, le quinze mars avant midy en vertu du décret de Mr le lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz dix du () et à la requête de Mr le procureur du Roy audit siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion all'encontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme accusés, qui fait élection de domicile en son hôtel seize rue de la petite Croix d’Or paroisse St Martin, je huissier au même siège demeurant rue de Juif rue paroisse Ste Croix soussigné ay donné assignation au nommé La Carrière charretier en cette ville par acte (et) sa personne à comparoir cejourdhuy () heures de relevée en la chambre du conseil dudit bailliage de Metz pour estre ouï en témoignage et depô() () vérité sur ce qu'il sera ……………….

 

15/3/1749 : audition du témoin

Du quinze mars 1749 en continuant deux heures de relevée

 

Jean Carrière voiturier en cette ville y demeurant rue du Champé derrière les Minimes paroisse St Euquaire âgé de quarante cinq ans témoin assigné par exploit comme dessus dudit Haillecourt dujourdhuy avons apparu après serment presté et enquis

A dit n'estre parent allié serviteur ny domestique des parties et dépose sur les faits de la plainte dont nous luy avons donné lecture, que le vendredy septième du courant vers le soir, sa femme luy dit d’aller parler au sieur Morisot marchand sous les arcades de la place St Louis qui avoit un voyage à luy faire faire, en s'estant rendu le dit Sr Morisot, luy proposa de luy fournir une charrette pour le conduire avec sa femme et ses enfants à la ville de Sarrebruck ou Loudviller, convinrent de prix à soixante livres, après quoy ledit sieur Morisot luy dit qu'il yroit prendre des effets le lendemain de grand matin qui estoient chez le nommé Potier cordonnier à la rue du Change pour les porter chez luy qui dépose, et les charger ensuite sur sa voiture au moment de leur départ, qu'il fut et convenu de se rendre aux environs du moulin de Saint Jullien et que les premiers venus attendroient, ce qui fut effectivement exécuté le lendemain samedy vers quatre ou cinq heures après midy ; se souvient qu'il emporta de chez le dit Potier deux sacs remplis à ce qu'il croit de linge, un coffre vuide, que la servante dudit Morisot en apporta un plus petit que l'on mis dans le premier, mais ne scait ce qu'il renfermoit, qu'il emporta aussy de chez ledit Potier un matelas, un lit de plume, trois oreillers et un traversin, qu'il a aussy emporté de chez ledit Morisot trois vieilles couvertures pour couvrir le chariot, a remarqué au moment que le dit Morisot et sa femme avec leurs enfants sont montés sur sa charrette sur le chemin de Saint Jullien qu'il y avoit trois petites boettes sur la dite voiture qui luy furent recommandé par laditte femme Morisot, et croit qu’elles renfermoient ses c(oiffures), qu'il les a conduits jusque la ville de Sarrebruck où ils sont arrivés le lundy suivant vers midy, et ne scait où ils sont allés depuis ce temps, qu'est tout ce qu'il a dit scavoir lecture faitte de sa déposition a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé signé et requis taxe

Jean Carrière, Gillot, Berteaux

 

Soit montré au procureur du Roy à Metz le 15 mars 1749

Gillot

 

 

15/3/1749 : demande par le procureur du roi de l’arrestation des Morisot et d’inventaire des biens

Je requiers pour le Roy lesdits Jean Morisot et sa femme être pris et appréhendés aux corps constitués prisonniers en prisons royalles de ce siège et en icelles écroués pour estre a droit estre ouis et interrogés sur les charges résultantes des informations, répondre encontre aux conclusions qui seront prises contre eux, et que pour constater les enlèvements et transports des meubles par eux faits les scellés apposés en leur maison soient levés et inventaire général dressé en ma présence de tous les meubles, titres et papiers et renseignement qui pourront être trouvés sous (icelles), Je requiers en outre que les quatre lettres à l’adresse dudit Morisot remises au dépositaire desdits scellés et par luy représentées de même que celles qui pourroient venir à la suite soient ouvertes et de l’ouverture dicelles procès verbal dressé si besoin est en ma présence pour le tout fait et à moy communiqué être requis ce qu'au cas appartiendra

Michelet de malvoisin

 

 

28/3/1749 : ordre d’arrestation des Morisot et d’inventaire des biens

Extrait des registres du bailliage de Metz

 

Vu le procès extraordinaire commencé à la requeste du procureur du Roy en ce siege plaignant en cas  de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion allencontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée et accusés, scavoir la remontrance dudit procureur du Roy à ce qu’il soit informé des faits énoncés et de la sortie des dits Morisot et sa femme dans les pays étrangers circonstances et dépendances et qu’il soit en outre procédé par monsieur le lieutenant criminel à l’apposition des scellés nécessaires en leur maison avec établissement de commissaire pour sûreté des effets titres et papiers qui y seront trouvés, le décret de mon dit sieur le lieutenant criminel au bas conforme du 10 du courant procès verbal d’apposition de scellés fait en conséquence le même jour en présence du procureur du Roy avec établissement de commissaire pour gardien des dits scellés, exploits d’adjournement de témoins faits par Haillecourt huissier en ce siège les 11 et 15 du dit mois controllés les mêmes jours par pierre en cette ville, informations des mêmes jours ; Le soir montré au procureur du Roy au bas dudit jour et les conclusions dudit procureur du Roy ; ouy le rapport de mon dit sieur le lieutenant criminel tout vu et considéré

Nous avons ordonné que le dit Jean Morisot et sa femme seront pris, appréhendés au corps et constitués prisonniers en prisons royalles de cette ville pour y estre écroués estre à droit estre ouys et interrogés sur les charges résultantes des informations et répondre en outre à celles autres fi() et conclusions que le procureur du Roy voudra contre eux prendre et voir procéder comme de raison, ordonné en outre que pour constater les enlèvements et transports des meubles par eux faits, les scellés apposés en leur maison seront levés par monsieur le lieutenant criminel et de suitte procédé à un inventaire général de tous les meubles, titres et papiers et renseignements qui pourront se trouver sous (icelles) le tout en présence du procureur du Roy, ordonne pareillement que les quatre lettres à l’adresse du Sr Morisot remises au dépositaire des scellés par le facteur et par luy représentées de même que celles qui pouroient venir à la suitte seront ouvertes et procès verbal dressé de la dite ouverture si besoin en la présence dudit procureur du Roy pour le tout fait et communiqué au même procureur du Roy et () requis ce qu'au cas appartiendra jugé à Metz le 28 mars 1749 signés au bas () Gillot, Loth, Formé, Dedon, Lionnard et Humbert, conseillers

 

 

9/4/1749 : dépôt par un huissier de l’assignation à comparaître pour les époux Morisot

L’an mil sept cent quarante neuf le deuxième avril en vertu du décret de prise de corps décerné par monsieur le lieutenant criminel au bailliage et siege royal de Metz du vingt huit mars dernier signé et scellé cy dessus et la requeste de monsieur le procureur du Roy audit siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion allencontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés, qui fait élection de domicile en son hostel seize rue de la petite Croix d’or paroisse st marrin, je huissier audiancier au dit bailliage de Metz y demeurant rue du cloître paroisse ste Croix, me suis transporté dans la maison et dernier domicile dudit Jean Morisot et sa femme ou estant et parlant à leur servante et luy ayant demandé où ils étoient, elle m’a fait réponse qu'elle n’en scavoit rien et qu'elle ne les avoit point vue depuis le dimanche matin neuf mars dernier et quelle ne scavoit ou ils estoient et après avoir fait une exacte perquisition des personnes dudit Morisot et sa femme dans toutes les chambres, cabinets, greniers, caves, coin et recoins deleur ditte maison et ne les ayant trouvés, je leur ay donné à chacun assignation à comparoir en personne à la première audience criminelle de messieurs du bailliage de Metz par devant mon dit sieur le lieutenant criminel huit heures du matin à la quinzaine prochaine qui eschera le samedy dix neuf du présent mois d'avril pour estre advois estre ouys et interrogés sur les charges et informations faites allencontre deux, répondre en outre à telle autres fins et conclusions que mon dit sieur le procureur du Roy voudra contre eux prendre et voir procéder comme de raison et a ce qu'ils n'en ignorent je leur ay à chacun donné et laissé coppie de mon présent exploit parlant que d’autre part le tout en présence et assistance de Pierre Cronne et Claude Toussaint bourgeois de Metz le premier demeurant rue de la Cour Becouryt le second rue de la Princerie paroisse Ste Croix qui ont signé avec moy comme témoins fait à Metz le dit jour

 

 

19/4/1749 : demande par le régisseur des biens des fugitifs de la levée des scellés afin de saisir les biens de la famille Morisot

A monsieur le lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz

Supplie très humblement Jean Baptiste de Bléville fermier général et régisseur des biens des religionnaires fugitifs du royaume, et autres réfractaires aux ordres du Roy, poursuittes et diligences de Me Pierre Jendelle des Roches son directeur en cette généralité, lequel fait élection de domicile en celuy de Mr Feuillette procureur audit siège, disant, que s‘étant pourvu par devant monseigneur l’intendant, il en auroit obtenu la permission de faire saisir au proffit de la régie tous les biens meubles et immeubles appartenant à Jean Morisot et Suzanne Jacob sa femme fugitifs pour cause de religion. Mais l’huissier chargé de faire ladite saisie s’étant mis en devoir de procéder à celle des meubles, en auroit été empêché par le gardien du scellé apposé sur iceux de votre autorité. Et comme le suppliant n’appris que l’information faitte contre lesdits fugitifs à la requête de monsieur le procureur du Roy étoit achevée, et que d’un autre côté, il importe à la régie de faire constater l’état des choses, le suppliant est obligé de recourir à votre autorité.

Ce considér(é), Monsieur, il vous plaise ordonner qu'en présence du suppliant il soit procédé par vous Monsieur, à tel jour et heure qu’il vous plaira judique, à la levée et reconnoissant des scellés par vous apposés sur les meubles, effets, titres et papiers délaissés par lesdits Morisot et sa femme fugitifs, et de suitte à l’inventaire général d’iceux et fer() justice

Jandelle des Roches

Feuillette

 

soit montré au procureur du Roy à Metz ce 19 avril 1749

Gillot

 

Je n’empêche pour le Roy les fins de la présente requête

Michelet de Malvoisin

 

Soit fait ainsi qu'il en reque() à l’effet de quoy nous nous transporterons mardy prochain vingt du courant deux heures de relevée dans la maison dudit Morisot pour ope() aux fins de la présente requête, en présence et () du procureur du Roy et comme aussi en la présence du (sujet). A Metz le 19 avril 1749

Gillot

 

 

19/4/1749 : proclamation du premier défaut de présentation des Morisot

Extrait des registres du bailliage de Metz

 

Du samedy dix neuf avril mil sept cent quarante neuf

Par devant nous les gens tenant ledit siège

Entre le procureur du Roy en ce siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion allencontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs, ledit procureur demandeur par Roubis son substitut aux fins de l’exploit de radjournement fait par Plaisant huissier en ce siège du deuxième du présent mois controllé le même jour par le sieur pierre en cette ville, contre lesdits Morisot et sa femme, Nous après avoir appeler à trois différentes fois les dits Morisot et sa femme par le dit Plaisant et qu'ils ne sont comparus, nous avons audit procureur du Roy ce requérant par le dit Roubis donné et octroyé deffaut premier contre lesdits Morisot et sa femme et pour le proffit ordonné qu'ils seront réadjournés à la huitaine par un seul cry public pour ce fait et communiqué au dit procureur du Roy estre requis et qu'au cas appartiendra

Fait le dit jour

Bertaux

 

 

22/4/1749 : levée des scellés apposés sur les biens des Morisot et inventaire

Cejourdhuy vingt deuxième avril 1749 deux heures de relevée dans la maison du sieur Jean Morisot marchand à Metz et sorti du royaume pour cause de religion, ce requérant Jean Baptiste de Bléville fermier général et régisseur des biens des religionnaires fugitifs du royaume et autres réfractaires aux ordres du Roy poursuittes et diligences de Mr Pierre Jeandelle des Roches son directeur en cette généralité, nous benoit gillot écuyer conseiller du Roy lieutenant criminel au bailliage et siège présidial de Metz, nous sommes transporté dans la maison dudit Morisot accompagné du procureur du Roy où estant et ayant reconnu les scellés mentionnés au procès verbal d’autre part sains et entiers, les avons levés en exécution de notre décret du dix neuf du courant, en conséquence déchargé Louis Haillecourt dépositaire de la garde desdits sceaux, et de suitte ordonné qu'il sera par nous procédé présentement à l’inventaire des meubles et effets titres et papiers qui se trouveront sous lesdits scellés et dans la dite maison, le tout en présence dudit Sr Jeandelle des Roches et du procureur du Roy, et attendu qu'il y a des marchandises dans la boutique nous avons à la réquisition dudit Sr Jeandelle des roches nommé la personne du sieur David etraine marchand bourgeois de cette ville pour en faire la description et prisée auquel inventaire a été procédé comme s'en suit, et a le dit Mr Jeandel des roches signés avec nous et le dit Sr etraine ensemble ledit Louis Haillecourt, le dit Sr Etraine ayant prêté serment de bien et fidellement faite ladite estimation.

 

Dans la boutique

total 393.6.1

total 290.6

Ce fait et attendu qu’il est cinq heures et demy sonnée avons cessé la présente vacation, et remis à demain neuf heures du matin, et avons fait fermer les portes de la boutique en dedans et en dehors, sur lesquelles nous avons reapposés quatre sceaux sur deux bande de papier et a ledit sieur estraine signé avec nous, Jeandelle des roches, et ledit Louis Haillecourt à la garde duquel les scellés reapposés ont été laissés à Metz ledit jour et an d’autre part

 

Du vingt trois avril 1749 en continuant neuf heure du matin en présence de toutes les parties cy devant nommés après avoir reconnus les sellés apposés sains et entiers et que iceux ont été levés

total 122.13.9

total 89.19.9

total 125.10.6

Ce fait et attendu qu’il est midy, avons cessé la présente vacation et remis à cejourdhuy deux heure de relevée

Après avoir fait fermer les portes de la boutique et sur icelles fait apposer quatre sceaux sur deux bandes de papier et laissé à la garde du dit Louis Haillecourt qui a signé avec nous et les parties cy devant nommées

 

Dudit jour vingt trois avril 1749 en continuant deux heures de relevée en présence des parties cy devant nommées après avoir reconnus les sellés apposé sains et entiers, et que iceux ont été levés

total 116.4. ?

 

Siamoises

total 250.9. ?

total 213.17.1

Ce fait et attendu qu’il est six heures avons cessé la présente vaccation, et icelle continuée à demain huit heures du matin, et avons fait refermer les portes de la boutique en dedans et en dehors, sur lesquelles nous avons apposés quatre sceaux sur deux bandes de papier que nous avons laissé à la garde du dit Louis Haillecourt qui a signé avec nous et les parties cy devant nommées

 

Du vingt quatre avril 1749 en continuant huit heure du matin en présence de toutes les parties cy devant nommées après avoir reconnus les sellés apposé sains et entiers, et que iceux ont été levés

total 38.11. ?

total 197.15.6

Ce fait et attendu qu’il est midy, avons cessé la présente vaccation et icelle remis à deux heure de relevée

cejourdhuy après avoir fait fermer les portes de la boutique et sur icelles fait apposer quatre sceaux sur deux bandes de papier et laissé à la garde du dit Louis Haillecourt qui s’en est chargé et a signé avec nous et les parties cy devant nommées

 

Dudit jour vingt quatre avril 1749 en continuant deux heures de relevée en présence des parties cy devant nommées après avoir reconnus les scellés apposé sains et entiers, et que iceux ont été levés

Total 67.15.6

 

Dans l’arrière boutique

    total 65.

 

Dans la cour

total 20.0

 

Ce fait et attendu qu’il est cinq heures sonnées nous avons cessé la présente vaccation, remis à demain deux heures de relevée et ont toutes les parties cy devant nommées signés avec nous le dit sieur Etraine pour ce qui le concerne et le dit Louis Haillecourt à la garde duquel nous avons laissés toutes les marchandises qui se sont trouvées dans la boutique cy dessus inventoriés de meme que les effets aussy cy devant inventoriés

 

Du vingt cinq avril 1749 en continuant deux heures de relevée

Dans une chambre haulte prenante jour sur la rue

 

dans un cabinet à costé de laditte chambre

 

dans une petite chambre attenante la première

 

dans une autre petitte chambre suivante prenant jour sur la cour

 

dans une seconde chambre haute prenante jour sur la rue

 

dans un autre cabinet

 

titres et papiers

 

Ce fait et attendu qu'il ne s'est plus rien trouvé à inventorier nous avons clos et fermé le présent inventaire en présence dudit mr pierre Jeandelle des Roches et du procureur de roy et à l’instant nous avons pris et recu le sermens de Elisabeth George servante dudit Morisot, de même que de Louis Haillecourt dépositaire de la garde des scellés, en vertu duquel ils ont juré et affirmés chacun à leur égard et en ce qui les concerne, ledit inventaire contenir vérité qu’ils n'en ont rien pris fait ny vendeta() directement ny indirectement et avons laisssé tous les effets et marchandises énoncés au présent inventaire du consentement dudit Jeandelle des Roches à la garde et dépost dudit Haillecourt pour les garder jusqu’au jour de la vente qui sera faitte et a signer avec nous, ladite Elisabeth George ayant déclaré ne scavoir écrire de ce enquise, à Metz ledit jour vingt cinq avril mil sept cent quarante neuf

 

La prisée du présent inventaire se monte à 2360.2.11

 

 

26/4/1749 : dépôt par un huissier de la deuxième assignation à comparaître pour les époux Morisot

De par le roy

Et Monsieur le Lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz

L’an mil sept cent quarante neuf, le vingt sixième avril en vertu de la sentence rendue par messieurs du bailliage et siège royal de Metz en datte du dix neuf du présent mois signé Berteaux et scellés, et à la requête de Monsieur le procureur du roy au même siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion à l’encontre de Jean Morisot marchand bourgeois de Metz et de sa femme accusés et fugitifs, qui fait élection de domicile en son hôtel seize rue de la Petitte Croix d’Or paroisse St Martin, je Louis Haillecourt huissier au même siège demeurent rue de Juif rue paroisse Ste Croix soussigné me suis transporté cejourdhuy au devant de la maison et dernier domicile dudit Morisot marchand bourgeois de cette ville et de sa femme accusés au devant de l’auditoire de Messieurs du Bailliage et siège royal de Metz, sur la place royale de cette ville où étant à l’assistance de George Micque tambour major de la ville de Metz demeurant rue des Grands Carmes paroisse Ste Segoleinne, et après que ledit George Micque tambour major a eu frappé sur sa caisse par trois différentes fois en chacun des susdits endroits présents grand nombre de personnes qui y sont accouru, j’ay à haute et intelligible voix réassigné et adjourné le dit Jean Morisot et sa femme accusés à comparoir tous deux en personne à la première audience criminelle de messieurs du dit bailliage de Metz par devant mon dit sieur le lieutenant criminel huit heures du matin à la huitaine prochaine qui échéra le mardy sixième du mois de may prochain pour répondre et procéder sur les fins des présentes circonstances et dépendances et à ce que lédits Morisot et sa dite femme accusés et tous autres () prétendent cause d’ignorance, j’ay afiché et laissé coppies tant de ladite sentance que de mon présent exploit à la porte et principalle entrée de la maison et dernier domicile dudit Morisot et de sa femme accusés, et à celles de l’auditoire de messieurs du dit bailliage de Metz, et au pillier royal de cette ville ; le tout en présence et à l’assistance du sieur Dieudonné plaisant aussy huissier au dit bailliage de Metz demeurant rue du Cloître paroisse susditte de Ste Croix et de Alexandre Barrois bourgeois de Metz y demeurant rue Cour Bacour paroisse Ste Croix qui ont signés avec moy comme témoins et le dit tambour major, fait à Metz le dit jour vingt sixième avril 1749

 

6/5/1749 : proclamation du deuxième défaut de présentation des Morisot

du mardy sixième may mil sept cent quarente neuf à l’extraordinaire

par devant nous les gens tenans ledit siège

entre le procureur du roy en ce siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion allencontre de Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs, le dit procureur du roy demandeur par feuillette procureur aux fins de l’exploit de readjournement fait par Haillecourt huissier en ce siége le vingt six avril dernier controllé le meme jour par pierre en cette ville, contre lesdits Morisot et sa femme, nous après avoir fait appeler à trois differentes fois les dits Morisot et sa femme par simony huissier audit siège, lesquels ne sont comparus, avons audit procureur du roy et requérant par ledit feuillette donné et octroyé deffaut second contre des dits Morisot et sa femme et pour le proffit ordonné que les pièces et procèdures seront communiqués au procureur du roy et de suite remises à monsieur le lieutenant criminel pour le tout fait estre jugé et qu'au cas appartiendra fait le dit jour.

Berteaux

 

Je requiers pour le roy le présent deffaut et le précédent être déclaré bien et valablement obtenu et en adjugeant le proffit d’iceux être ordonné que les témoins ouis ez informations et autres qui pourroient l’être de nouveau seront recollés en leurs dépositions et que les recollements vaudront confrontations aux accusés pour ce fait et à moy communiqué être conclu ce qu’au cas appartiendra

Michelet de Malvoisin

 

 

23/5/1749 : déclaration de validité des deux défauts de présentation

Du 23 may 1749

Vu le procès extraordinairement commencé à la requête du procureur du roy en ce siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion contre Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés, scavoir la remontrance du dit procureur du roy à ce qu’il soit informé des faits y énoncés et de la sortie des dits Morisot et sa femme dans les pays étrangers circonstances et déppendances, et qu’il soit en outre procédé par monsieur le lieutenant criminel à l’apposition des scellés nécessaires en leur maison avec établissement de commissaire pour sûreté des effets titres et papiers qui y seront trouvés, le décret de mon dit sieur le lieutenant criminel au bas conforme du 10 mars dernier, proces verbal d’apposition de scellé fait en conséquence le même jour en présence du procureur du roy avec établissement de commissaire pour gardien dudit scellé, exploits d’adjournement de témoins faits par Haillecourt huissier en ce siège les 11 et 15 dudit mois de mars, controllé les mêmes jour par pierre en cette ville, information des mêmes jours, le soir montré (ou en outre) au procureur du roy dudit jour 15 mars, ses réquisitions en suitte, jugement du 28 du dit mois portant décret de prise de corps contre le dit Morisot et sa femme, et en outre que pour constater les enlèvements et transports des mebles par leur fait, les scellés apposés en leur maison seroient levés par mon dit sieur le lieutenant criminel et de suitte procédé à l’inventaire général de tous les meubles, titres papiers et renseignements qui pourront se trouver sous iceux, le tout en présence du procureur du roy, et en outre que les quatre lettres à l’adresse dudit Morisot remises au dépositaire des scellés par le facteur de la poste et par luy représentées de même que celles qui pourroient venir à la suitte seroient ouvertes et procès verbal dressé de ladite ouverture si besoin estoit en présence du dit procureur du roy pour le tout fait et communiqué au dit procureur du roy estre requis et qu’au cas apartiendroit, exploit de perquisition des personnes des dits Morisot et sa femme fait par Plaisant huissier le deux avril suivant controllé le même jour par le dit Sr Pierre avec assignation à comparoir à la quinzaine, deffaut premier donné à l’audience du 19 du dit mois d’avril contre les dits Morisot et sa femme, et pour le proffit auroit été ordonné qu’ils seroient readjournés à la huitaine par un seul cri public, exploit dudit readjournement fait par le dit Haillecourt du 26 du dit mois d’avril controllé le même jour par le dit sr pierre, requete de Me Jean Baptiste de Bléville fermier général et regisseur des biens des religionnaires fugitifs du royaume, et autres refractaires aux ordres de sa majesté, pour suiites et diligences de mr pierre Jeandelle des Roches son directeur en cette généralité tendant à ce qu’il soit ordonné qu'en sa présence il seroit procédé par mon dit sieur le lieutenant criminel à tel jour et heure qu'il luy plairoit jeuidicque à la levée et reconnoissance des scellés apposés sur les meubles effets titres et papiers delaissés par le dit Morisot et sa femme, et de suitte à l’inventaire général diceux, le décret de mon dit sieur le lieutenant criminel au bas conforme du dit jour 19 avril, en suitte des conclusions du procureur du roy sellé le 22 dudit mois par le dit sieur Pierre, procès verbal de reconnaissance et levé des dits scellés et inventaire dressé par mon dit sieur le lieutenant criminel du 22 avril et jours suivants controllé et scellé le 29 au bureau de Metz par le sieur Pierre, deffaut second donné à l’audience du 6 du courant pour le proffit duquel et du précédent avoir été ordonné que les pieces seroient verifiés es mains du procureur du roy et de suite à monsieur le lieutenant criminel pour estre jugé ce qu’au cas apartiendroit, conclusion dudit procureur du roy, ouy le raport de mon dit sieur le lieutenant criminel tout veu et considéré

Nous avons déclaré lesdits deffauts bien et vallablement obtenu et en adjugeant le proffit d’iceux, ordonné que les témoins ouys es informations et autres qui le pourront être de nouveau seront recolés en leur déposition et que lesdits recolements vaudront confrontation aux dits accusés fugitifs, pour le tout fait et communiqué au procureur du roy, estre jugé et qu'au cas apartiendra, jugé à Metz le 23 may 1749

Gillot, Dilange, Loth, Lionnard, Vaillant, Humbert, ma()rrobe

 

 

23/5/1749 : deuxième requête de comparution des témoins

De l’ordonnance de nous Benoit Gillot, écuyer conseiller du roy lieutenant criminel au bailliage et siège présidial de Metz, à la requete du procureur du roy en ce siege plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion contre Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs, il est enjoint au premier huissier requis d’assigner à comparoir par devant nous cejourd'huy deux heures de relevée et jours suivants à pareille heurre en la chambre dudit siège tous les témoins qui luy seront indicqués pour être recolés en leur déposition, lesdits recollements valloir confrontation aux accusés, fait et donné au dit Metz sous le scel royal du bailliage de la même ville le vingt trois may mil sept cent quarante neuf.

Gillot

 

23/5/1749 : assignation à comparaître pour les témoins

L'an 1749, le vingt troisième may en vertu de (l’ordonnance) remont() le lieutenant criminel au bailliage et siège royal de Metz cy dessus et à la requête de Monsieur le procureur du roy audit siège plaignant en cas de contraventions aux édits et déclarations du Roy pour causes de Religion contre Jean Morisot marchand bourgeois de Metz et Suzanne Jacob sa femme accusés, qui fait élection de domicile en son hôtel seize rue de la Petite Croix d’Or paroisse St Martin, je huissier au même siège demeurant rue de Juif rue paroisse Ste Croix soussigné ay donné assignation au nommé La Carriere chartier bourgeois de Metz et à sa femme, au nommé Potier Brandevinier bourgeois de Metz, à Elisabeth George fille servante demeurant en cette ville et au Sr Pacquin advocat au parlement, à comparoir tous cejourdhuy deux heures de relevée en la chambre du conseil du bailliage de Metz pour estre recollés en leurs dépositions moyennant salaire et sur les pièces de l’ordonnance à ce qu’ils n’en ignorent je leur ay donné et laissé coppie de mon présent exploit en leurs domiciles par () et à leurs personnes.

Metz le dit jour vingt trois may 1749 avant midy

Haillecourt

 

 

23/5/1749 : comparution des témoins pour confirmation de leur témoignage

Recolements faits par nous Benoist Gillot écuyer conseiller du roy lieutenant criminel au bailliage et siège présidial de Metz, à la requête du procureur du roy aux dits sièges plaignant en cas de contraventions aux Edits et déclarations du roy pour cause de religion, contre Jean Morisot marchand bourgeois de cette ville et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs auxquels recolement nous avons procédé en la chambre du conseil des dits sièges et fait rédiger comme s'ensuit par Mr Joseph Berteau greffier commis desdits sièges.

 

1 Jean Carrière cinquième témoin de l’information recolé en sa déposition après serment presté et lecture faitte a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé n'y veut adjouter ny diminuer ; lecture faitte du présent recolement y a persisté du tout interpellé signé et requis taxe

Jean Carrière, Gillot, Berteaux

 

2 Magdelaine Goullon deuxième témoin de l’information recolé en sa déposition après serment presté et lecture faitte a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé n'y veut adjouter ny diminuer ; lecture faitte du présent recolement y a persisté du tout interpellé, déclaré ne scavoir écrire de ce enquise et requis taxe

 

3 Nicolas Pottier quatrième témoin de l’information recolé en sa déposition après serment presté et lecture faitte a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé n'y veut adjouter ny diminuer ; lecture faitte du présent recolement y a persisté du tout interpellé signé et requis taxe

Nicolas Pottier, Gillot, Bereaux

 

4 Elisabeth George premier témoin recolé en sa déposition après serment presté et lecture faitte a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé n'y veut adjouter ny diminuer ; lecture faitte du présent recolement y a persisté du tout interpellé, déclaré ne scavoir écrire de ce enquise et requis taxe

 

5 Mr Jean Baptiste Pacquin troisième témoin de l’information recolé en sa déposition après serment presté et lecture faitte a dit icelle contenir vérité y a persisté de ce interpellé n'y veut adjouter ny diminuer ; lecture faitte du présent recolement y a persisté du tout interpellé signé et refuse taxe

Pacquin, Gillot, Berteaux

 

 

28/5/1749 : réquisitions du procureur du roi

Vu le procès extraordinairement instruit à ma requête allencontre de Jean Morisot marchand bourgeois de Metz et Suzanne Jacob sa femme nés sujets de sa majesté et dans la religion prétendue réformée accusés et fugitifs, scavoir ma remontrance du 10 mars dernier, le décret conforme du même jour, proces verbal d’apposition de scellés dans leur maison du même jour en ma présence avec établissement de commissaire pour gardien desdits scellés informations des 11 et 15 dudit mois, mes requisitions aubas à ce que lesdits Jean Morisot et sa femme soient pris et apprehendés aux corps constitués prisonniers ez prisons royalles de ce siège et en icelles écroués pour estes à droit être ouis et interrogés sur les charges résultantes desdites informations répondre en outre aux conclusions qui seront prises contre eux et que pour constater les enlèvements et transports des meubles par eux faits les scellés soient levés et inventaire général dressé en ma présence, et en outre que les quatre lettres à l’adresse dudit Morisot remises au dépositaire desdits scellés et par luy représentées de même que celles qui pourroient venir à la suitte soient ouvertes et de l’ouverture d’icelles procès verbal dressé si besoin est en ma présence, le jugement du 25 dudit mois conforme, l’exploit de perquisition des personnes desdits Morisot et sa femme du deux avril suivant avec assignation à comparoir à la quinzaine, le premier deffaut du 19 dudit mois qui ordonne qu’ils seront réajournés à la huitaine par un seul cri public, exploit dudit réajournement du 26, la requête présentée par Me Jean Baptiste de Bléville régisseur des biens des religionnaires fugitifs du royaume poursuites et diligence de Me Pierre Jeandette des Roches son directeur en cette généralité, le décret au bas du 19, ensuitte de mes conclusions, le procès verbal de reconnoissance et levée desdits scellés et l’inventaire faits le 22 avril et jours suivants, le deffaut second du 6 du courant, mes réquisitions à ce que lesdits deux deffauts soient déclarés bien et valablement obtenus et en ajugeant le proffit d’iceux qu’il soit ordonné que les témoins ouis ez informations et autres qui pourroient l’être de nouveau soient recollés en leurs dépositions et que les recollements vaudront confrontation aux accusés pour ce fait être conclu ce qu’au l() appartiendra, la sentence de recollement du 23. les recollements faits en conséquence le même jour, ensemble les autres pièces jointes tout vu et considéré

 

Je requiers pour le roy la contumace être déclarée bien instruite contre lesdits Jean Morisot et sa femme et adjugeant le proffit d’icelle Iceux déclarés deuement atteints et convaincus d’être sortis hors du royaume quoyque nés dans la religion prétendue réformée contre et au mépris des ordonnances de sa majesté pour reparation de quoy ledit Jean Morisot être condamné à servir le roy à perpetuité en qualité de forçat sur les galères après avoir été marqué sur l’épaule dextre d’un fer chaud ayant pour empreinte les trois lettres G.a.l. et ladite Suzanne Jacob sa femme à être rasée et recluse dans une maison régulière pour le reste de ses jours, leurs biens déclarés acquis et confisqués au proffit de qui il appartiendra sur iceux préalablement pris la moitié de leur valeur d'amende envers le roy en cas que confiscation n’auroit lieu au proffit de sa majesté. Et que la sentence qui interviendra sera transcritte dans un tableau qui sera attaché par l’exécuteur de la haute justice à une potence qui pour cet effet sera plantée en la place de St Louis de cette ville

A Metz le 28 may 1749

Michelet de Malvoisin

 

Les 4 lettres confisquées

 

1 Lettre de Jean Jacob à sa sœur Susanne

 

A Londres le 4 mars 1749

Ma très chère et tendre soeur

Celey est avec tous la sinsérité pausible que j'ay l'honneur de vous assurer de mes très humbles respect est à tous ce qui vous apartiens j'ay receu vos deux dernier lettres qui m'ont été rendue dans leurs temps je vous félicittes du mariage de ma sœurs charlotte est surtous qu'elle est s'y bien pourveus je m'en renjouis quand au difiqultté que vous trouvé je n'en suit pas surpris il y en a partous je prie Dieu que vous les surmontais tous est d'acomplire vos justes desain quand à Moy de persuader Ma chère Mère à venir icy sy elle ne s'y trouvay pas aussi bien que là où elle est je pouray en avoir des reprauches quoy que pour tens je luy marqueray mon sentiment il paray que depuis que la pay est publié que le commerce se rétablis quand vous me feray l'amitiés de m'écrire je vous prie de me Marquer sy vous continué dans vos desaint que j'espère. Comment vous vous praupausé de faire est là où vous voulé vous enbarquer est quelle chemin vous voulé prandre est à peux près le temps par ce que j'ay plusieurs de mes amy qui voiage en plusieurs endroy est endiferant paurt pour ce que vous trouviés plus fasilement à vous tirer d'affaire est comment vous vous praupausé à remettre tous vos rubant jaune qui sont fort à la maudes dans ce pays icy est je vous conseille de ne rien aporter autre chause car cela vous couteray plus de fray que cela ne vaudray sy vous avé en vie d'envoyer d'avance vaus cherres enfants que vous pouvé faire fasilement est le plus cour chemain de len envoyer à paris à un de mes (intimes) amis qui vas à Paris 6 fois par ans il seront aussy sure entre ces mains que sy elle estois entre les votre de Paris il les amaineras à Callais là où il s'enbarqueront est sy le vant est favorable dans 4 heures ils seront en Angleterre je n'ay pas besoint de vous directer comment vous les pauray les envoyer à Paris sandoutes qu'il y a souvent des personne qui sont de votre connessance qui y vont qui en prandront soint jusque a la, ensuit il seront en bonne main je voudray Ma cherre sœur que je puis vous directer comment faire pour le mieux mais lessé moy savoir vos sentiment est pour lors je prenderay des mesures qui vous conduiront dans nos paurt cens danjet ne vous épouvanté point de la mer comme sy elle engloutisay tous ceux qui y voiage il n'y a rien de cela conté ma chère sœur que je feray tous mon pausible pour vous rendre tous les services que je suit capable je ne voudray pas vous faire icy mon personnage mais vous trouveray un fraire qui est d'un bon naturelle je prand la liberté de saluer mon cherre fraire votre chere espous est tous vaus cherre enfants que j'enbraces comme vous ma femme

en fait de maimes, est tous mes enfant qui sont au nombre de 5, la famille de mon bau-père vous salue est Mr mesinaque voysi ma femme qui se joint à ma lettre est je croyay vous l'a voir marqué auparavant qu'elle parle francois comme () je finy en vous embrassant est suit Ma cherre sœur en vous recommandans à la grâce de Dieu est tous ce qui vous apartiens votre très humble serviteur est fraire

Jean Jacob

 

Ma chèr sœur je vous ambrase tous entendant le plésir de vous voir ici et pour vous assurer de mes très humble sivilité e vous fait les mesmes souhait que mon mari e a tous ce qui vous appartiens quand vous écrirés à ma chèr mère je vous pri de l'assurer de mes respest de mesme qu'à mes sœurs e je suis votre servante j'ambrase monsieur Maurizot et vos cheur enfans et je vous félicite du mariage de ma soeur

Je parle francois comme un anglois

Anne Jacob

 

Mon très cherre oncle et ma très cherre tante je prens la liberté de vous asseurer de mes très Humble servilité. J'enbrasse mon chers cousin est mes cousines est suis parfaitement votre très Humble Serviteur est Neveux

Denis Jacob

 

 

2 Lettre de Jean Jacob à sa mère

A Londres le 4 mars 1749

Ma très chère est tendre Mère

Celey est pour avoir l'honneur de vous assurer de mes très humble respet est mes chère sœurs je vous félicittes du mariage de ma chère sœur Charlotte que j'enbraces comme vous est tous ceux qui vous apartiens de tous la sinsérité de mon cœur je prend la liberté d'enbrasser Mr dit razon mon chere bau fraire que je luy souhaites joye de tous la sinsérité de mon cœur chère bonne mère j'espère qu'à présent que le mariage de ma sœur vous feras prendre d'aultre résaulutions qu'il n'y a plus d'autre chause qui puis vous tenir à cœur est qui vous puis enpaicher de venir faire votre résidance avec un fils qui dis l'atandre je n'es a toujours cherché toutes les aucasions à vous montrer des tray de sa reconnoisance est qui aujourd'huy se flate avant que la providance nous sépare de nous revoir est que vous ne lesseray pas partir Mr Maurizau qui a tous l'estime pausible pour vous sans le joindre est sa chère famile croyé moy je croy que vous ne perderay rien au change enfin je ne voudray pas vous trop persuader mais seulement d'y faire réflections le voyage n'est qu'une bagatelle surtous là où vous est en desendans le rin vous seray bientaus en Haulande surtous que voicy le bau temps san doutes que ma sœur Charlotte resteras avec son maris a ant une enploy il ne le quiteras pas pour venir icy cela vous dois bien tranquiliser l'esprit dès qu'elle est maryés avec une honnaites homme est de probité doumoin vous seray avec la meilleur partis de votre chere famile qui vous chérisse tous seulement je vous prie d'y faire réflections l'on vous a fait notre climas afreux il n'y a rien de cela nous avont de la pluie est du bau temps comme vous l'avé selon les saison je m'étay tellement flaté que vous vienderay par vos praupre lettres que j'auray pris toutes les praucautions imaginable à votre égare que sy vous n'avié pas assé de bien pour vivre de vos rantes que j'auray obtenus un petites pansions il n'y a à présent que vous est ma sœur anne cela est encore plus fasile je m'étay flaté de trouver un maris pour ma sœur charlotte mais charmé qu'elle soit pourveu. Mon espouse vous enbraces tous est mes chère enfants qui sont au nombre de 5 est ma femme parle francois comme moy adieu chère bonne mère sans adieu je me flates encore d'avoir le plaisir de vous revoir est ma sœur Anne est j'espère que ce ne seras lontemps j'enbraces tous nos parants est amy est je suit en atendans votre réponce favorable sur ce sujet. Ma très chère mère votres très humble serviteur est affectioné fils est obéissant

Jean Jacob

 

 

3. Lettre de Susanne Baudesson à sa fille Susanne Jacob et à son gendre Jean Morisot

A Bichevilleur le 7 mars 1749

Mes chers enfans je souhaite que la présante vous trouve tous en bonne santé Charlot m'a envoyé une lettre que vous luy avez escrist par laquel vous luy envoyé mor()esgiere pour lequi est du laurain je vous prie de louer la maison à qui vous voudrez ne la louez qu'à des honete jean, je ne ces sy vous este payé de monsieur Brasy j'ay escrit à ma cousine sur se suiet la priant qu'elle montre ma lettre à monsieur de Brazy et que je le prie qu'il retire son billet je le prie qu'il me tire de paine et que seray comme s'il me le donnet et que j'an n'auroit affair comme le poison à de laux pour se qui est de monsieur r() je ne voit pas qu'il se diligante bien fort pour la meterée je le connet pas encore je n'ay point resus de ces nouvelles depuis son départ. la lettre que vous avez escrit à Charlotte par laquel vous lui dites adieu en persistant de randre visite à votre frère voilà toutes mes espéranse perdue senetes pas se que monsieur Morisot, je voy bien qu'il me faut résoudre à passez le reste de mes jours en un village bien malgrez moy je n'auroy jamais crue que je seray abandonez de toute ma fammille comme je le suis vous pouvez juger de nostre estast qui sy l'une tombe l'autre net pas en estas de la relevez ou se metre en une hopitale vous m'avié escrit que vous n'irié pas si loin que vostre famme croyes, est que Charlot sans hirés à Strasbourg et que moy et ma pauvre Nanet nous yrions avec vous sela m'avoit mis le baume dans les os mais maintenant j'ay le poison. quand j'ay sorti de Metz vous ne m'avez pas dit que c'estoy pour revoir vostre frère sy vous me l'avié dit j'auroit pris mes précautions je ne me seroit pas retirer dans un village vous vous serié bien dispansés de traitez vostre seur de madame sela ne luy conviens pas sur tout a une seur, vanitez des vanitez tout et vanitez et rongement d'esprit elle a quittez une bonne mère pour se ranger à une belle mère je n'an dis pas davantage vous auray de la paine à lire ma lettre parce que je la larouse de mes larme sy la prier ne metes pas pour refuge en mon adversitez je ne ses pas se que je deviendrais. Nostre Morisot se porte bien je luy avoit dit de vous escrire mais il ne la pas fais je nay pas voulus qu'il aille à Strasbourg voire la réjouissans de la pais de peur de malleur il y a eut 10 hommes de tués et quand je luy ay montré vostre lettre il c'est mis à pleurée a() nous, en ()disan ne croyé pas sela, mon père et ma mère son trop bon pour vous abannoné sy ma mère avoit ceste envie elle n'avoit que faire de me faire apprandre l'allemant monsieur Fabre voulet vous escrire sur se sujet mais je luit en ay empechée de peure que sa lettre ne soit conue aussy je met tout en les mains de Dieu il faut estre jeune pour aller en se pays vous auray le déplaisir de voire tomber la machoire à mes chers enfans la plume me tombe des mains je vous embrase et vous donne ma bénédiction et suis vostre mère

Susane Baudeson. Mes compliments à ma cousine et à toute mes amies monsieur Fabre vous salue

 

 

Lettre de Anne Jacob à sa sœur Susanne et son beau-frère Jean Morisot

Mon chère frère et ma chère sœur permettez moy de vous saluer et de vous embrasser de tout mon cœur emcore une fois avec mes deux chère enfans que je porte dans mon cœur jusqu'à ma mort. Il y a quelque mois que nous avons receu une de vos lettres mon frère par laquelle vous nous marquiez que puisque ma sœur estois mariez que vous vienderiez aux Deux Ponts et que nous aurions la consolation d'aitre réunis ensemble dans son église militante jusque à que Dieu nous retire dans sa trionfante. C'estois la meilleurs pansé que vous ayez jamais eut. le jour qui nous apprens que vous avez changée de sentiment nous comble d'amertume et nous mest a deux doit de la mort sur tout ma chère mère qui est inconsolable et qui fait pitiez à tous le monde nostre chère pasteur fait tous ce qu'il peux pour la comsoler quoy dit elle () enfant que j'ay eslevée sy tendrement et qui m'a couttez tant de soupir est tant de larmes m'abandonne dans sa blanche vieillesse j'ay peur que leffusions de ses larmes ne crie vengence devant Dieu. Cependant je ne doute pas que Dieu ne recompansera pas abondemment de bon dessaint que il a mis dans vos cœurs il vous secondera et vous donnera sa main puissante pour vous guider jusque ce que vous veniez aux bout et pour en recevoir la couronne mais avant se temps sy vous avez encore un peux de naturel pour une bonne mère comme je n’en doute pas avec vos joyes vous auray la tristesse de laisser une bonne mère noyez dans les larmes que Dieu escrira de sa main je n'ay rien à vous prescrire je vous prie de panser à ses choses s'il plaist à Dieu de vous mestre aux cœur de venir aux Deux Ponts croyez que se sera seulement une petite pose que vous feray je suis vostre pauvre sœur

Anne Jacob

Ma chère mère voulois acheter un gros cochon croyant que nous le mangerions ensemble à pressant nous nous n'en avons que faire il nous faut peu de terre pour nous () encore plus ……………

 

 

4 Lettre de Johan Herrenschmidt à Jean Morisot

Bouquenom le 30 mars 1749

Monsieur,

Celle cy est seulement pour vous prier de me dire sy vous n'avez pas encore eu occasion de parler au Sr Carl le() Houssard du quel je vous ay fait mention par ma dernier () sy il n'est pas à Metz pour que nous nous m() sa personne touttes hors de nos têtes je vous prie donc monsieur de voulloir m'onhorer de votre réponse au plus tôt je vous rembourserai les port et me(stre) à vos services par () en toutte occasion étant très parfaittement

Monsieur

Votre très humble et obéissant (serviteur)

Jh Herrenschmidt

 

Ma femme et Catherine vous font et à mademoiselle votre chère épouse leurs (compliment) moy également

        Jean-Louis CALBAT

retour à la page Lorraine

retour à la page d'accueil Huguenots